BEYOND THE TIME BARRIER

Edgar G. ULMER (1904-1972)

Etats-Unis, 1960

Robert Clarke, Darlene Tompkins, Vladimir Sokoloff

Beyond The Time Barrier fait partie de ces seconds couteaux des films de SF, intéressants sans être inoubliables. Il faut dire que le budget n’a apparemment rien à voir avec celui d’un classique comme Planète Interdite, réalisé trois ans plus tôt. Le métrage est en noir et blanc, et les effets spéciaux sont pour le moins limités, de l’avion supersonique dessiné sur un fond étoilé jusqu’à la découverte de la cité du futur, toujours présenté en matte-painting indépendamment du pilote qui la découvre, leurs plans respectifs étant simplement alternés...

L’histoire elle-même décline le thème du voyage dans le temps, mais de manière relativement traditionnelle. Un pilote de l’armée américaine, chargé de tester un avion supersonique aux capacités sans précédent, se retrouve, par une conjonction mathématique plutôt amusante des rotations terrestre, solaire et de sa propre vitesse, projeté dans l’avenir, dans la première moitié du XXIème siècle précisément. Il y découvre une Terre désertée, avant de se faire capturer par les habitants d’une cité souterraine, au décor austère, basé sur le motif du triangle.

Après quelques longueurs, il découvre finalement la réalité de son voyage temporel, et apprend que la planète a souffert, quelques décennies auparavant, d’un mystérieux fléau qui a décimé la moitié de la population mondiale et enclenché des mutations chroniques chez la plupart des autres, les rares individus épargnés s’étant réfugiés au sein des colonies installées sur d’autres planètes du système solaire. L’originalité de ce scénario, c’est que ce fléau n’est pas directement atomique : il trouve en effet sa source dans la dégradation de l’atmosphère suite aux retombées des essais nucléaires, qui a permis aux radiations cosmiques d’infecter les êtres humains. Une anticipation des problèmes actuels de dégradation de la couche d’ozone liée à l’industrialisation, en somme.

Pour le Suprême, dirigeant de la cité, cette arrivée d’un homme épargné par le fléau constitue un espoir, celui de générer une lignée d’individus sains, grâce à sa petite-fille, Trirène, sourde-muette mais restée féconde, contrairement aux autres femmes de ce refuge. Ce n’est pas du goût d’autres voyageurs en provenance d’un passé moins lointain que celui du héros, capturés antérieurement, qui ne songent qu’à repartir dans leurs époques respectives. Tiraillé entre l’amour (ou plutôt l’attirance) qu’il éprouve pour la jolie Trirène, et son souci de prévenir son époque du danger qui menace, le pilote ne va finalement pas hésiter longtemps, en décidant de tenter de franchir à nouveau la barrière du temps.

Tout cela est un peu poussif, et ce n’est qu’à la fin du film qu’on se laisse prendre davantage par le rythme plus soutenu, avec la libération des mutants qui envahissent la cité, l’éclatement du noyau des voyageurs du passé, chacun désireux de regagner son époque, et la mort tragique de Trirène, qui sonne le glas d’une espèce condamnée. Le retour du héros, surtout, ménage une surprise qui évite de faire de Beyond The Time Barrier un film par trop prévisible, même si elle n’atteint pas l’intensité de celle de La jetée et de L’armée des douze singes.

Plus que de vouloir renouveler les thèmes de la SF, ce métrage, vite vu et seulement en partie notable, est l’occasion d’exalter les valeurs de liberté (le héros préfèrant sa liberté plutôt qu’un enfermement dans l’amour), d’espoir et même de foi, de par la confiance que le Suprême accorde au pilote pour tenter d’inverser le cours des choses. Beyond The Time Barrier est ainsi une sorte d’épisode de la série The Twilight Zone quelque peu rallongé, qui n’exploite pas toutes les possibilités de son scénario (entre autre l’origine chronologiquement diversifiée des divers pilotes prisonniers), mais se contente d’offrir un spectacle dépaysant.