Accueil > TGBSF > E- > L’étoile de Pandore

L’étoile de Pandore

samedi 14 avril 2007, par Maestro

Peter F. HAMILTON (1960-)

Grande-Bretagne, 2004, Pandora’s Star

Bragelonne, 2005 & 2006, 2 volumes.

Peter Hamilton était surtout connu en France pour ses cycles parus chez Robert Laffont, dans la célèbre collection de Gérard Klein, Ailleurs et Demain (Rupture dans le réel ou L’alchimiste du neutronium). Jean-Claude Dunyach l’a également accueilli au sein de la collection qu’il dirige chez Bragelonne, avec un cycle de space opéra démesuré comme on les aime.

Grâce à la maîtrise de la technologie des trous de ver, l’humanité s’est lancée dans une vaste entreprise de colonisation de l’espace, créant un Commonwealth Intersolaire toujours en pleine expansion, comme une extension du capitalisme réitérant son aventure de l’âge industriel à une échelle supérieure ; les voyages à travers les trous de ver sont d’ailleurs aux mains d’une firme privée, et les inégalités sociales plus vivantes que jamais. Mais en ce XXIVème siècle, des mystères persistent dans l’infini de l’éther, telle cette sphère de Dyson édifiée en un temps record autour d’une étoile lointaine. C’est ce qui va amener à envoyer à sa découverte un vaisseau spatial, Seconde Chance, dirigé par un des premiers hommes à s’être autrefois posé sur Mars...

Sans faire preuve d’une qualité formelle exceptionnelle, ce roman de Peter Hamilton décline avec efficacité et intérêt les codes du space opera : foisonnement de personnages, avec des trames multiples qui tournent autour de la dite sphère de Dyson et d’une enquête sur des meurtres étranges ; planètes exotiques, chaque monde du Commonwealth fédéral présentant des caractéristiques variées, d’un féminisme matriarcal à un peuplement écossais, en passant par un monde totalement dominé par les intelligences artificielles ou une Nouvelle république démocratique allemande (sic !). Plus original, une dimension politique est clairement présente, avec l’existence d’un Parti socialiste intersolaire, désireux de mettre fin aux inégalités de cet univers futuriste, telles les implants électroniques, le rajeunissement ou la résurrection clonée réservés aux seuls riches. Proche de ce Parti, existe une organisation plus secrète, les Gardiens de l’individualité, qui combat, y compris par le terrorisme, contre l’influence délétère supposée d’une mystérieuse entité extra-terrestre nommée l’Arpenteur des étoiles. On regrettera seulement que cette dimension politique soit trop superficiellement survolée en ce qui concerne son contenu idéologique proprement dit.

Les extra-terrestres mis en scène dans le roman sont d’ailleurs extrêmement pluriels : si l’Ange des hauteurs est le modèle même d’un vaisseau arche qui abrite diverses espèces sous la houlette d’une entité anthropologue, les Silfens relèvent davantage du fantastique et de l’onirisme, avec leur maîtrise d’étranges chemins entre les mondes. Le roman, sans abuser des scènes d’action, fait preuve d’un rythme prenant et bien dosé, en dépit d’un début un peu plus poussif, avec une fin haletante, qui pousse le suspens à son paroxysme ! Une carte des différentes planètes et sphères de colonisation aurait toutefois constitué un plus bien utile pour le lecteur.

Le second tome (qui n’en constituait en fait qu’un seul dans l’édition originale) de ce cycle signé Peter Hamilton -la suite étant Judas déchaîné- reprend l’intrigue là où elle avait été laissée, mais en écartant bien trop vite le suspens antérieur pour un début un peu lent, en particulier avec les tractations entre les grandes familles du Commonwealth autour des enjeux économiques et politiques liés à la constitution d’une grande Agence spatiale. L’urgence est en effet désormais de se préparer à l’affrontement avec la civilisation dévoilée par la disparition de la sphère de Dyson. C’est d’ailleurs avec la description de l’intérieur de cette forme de vie exogène que le roman se fait plus prenant, une forme de vie brute de décoffrage, dont l’expansion constitue l’essence même. Parallèlement, on suit les pérégrinations d’Ozzie et de ses compagnons, voguant à travers des planètes inconnues par les chemins des Silfens, et les enquêtes de l’imperturbable Paula Myo, qui en vient à se demander si les gardiens de l’individualité n’ont pas finalement raison dans leur idéologie du complot...

Le roman contient son lot de surprises et de retournements de situation, et si l’ensemble reste classique, il n’en est pas moins captivant et rondement mené. En outre, Peter Hamilton évite le manichéisme de mise dans les anciens space opéras, au profit de réalités ambiguës. Il en est ainsi pour Huxley’s Haven, la planète d’origine de Paula Myo : basée sur un fonctionnement communiste, sa société est toutefois divisée en castes élaborées avant la naissance par manipulation génétique, à l’encontre de l’égalité chère aux idées socialistes (la référence au Meilleur des mondes d’Aldous Huxley n’est donc pas innocente, tout comme les divers autres clins d’œil égrenés tout au long du livre). L’ouvrage se termine avec l’explosion guerrière de mise, décrite aussi efficacement qu’un reportage journalistique, et de nouvelles révélations, qui prouvent que Peter Hamilton est un expert en ce qui concerne les ficelles du roman feuilleton le plus efficace, à défaut de manifester une originalité extrême.

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d'indiquer ci-dessous l'identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n'êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions'inscriremot de passe oublié ?