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Temps
Les univers multiples *
samedi 19 mai 2007, par
Stephen BAXTER (1957-)
Grande-Bretagne, 1999, Time - The Manifold Trilogy, 1
Fleuve Noir, collection "Rendez-vous ailleurs", 2007, 552 pages.
On ne présente plus Stephen Baxter, un des géants actuels de la SF britannique. Ces dernières années, il s’est lancé dans deux trilogies parallèles, celle des Enfants de la destinée (avec Coalescence, déjà chroniqué) et celle qu’inaugure Temps. On se retrouve là en terrain connu. Dans un futur très proche, un ancien membre de la NASA décide de relancer l’exploration spatiale en se fixant comme premier objectif l’exploitation minière d’astéroïdes. Mais son but principal est de démarrer la colonisation de l’espace vue comme la mythique nouvelle frontière, si chère aux Etats-Unis. On évolue là dans une problématique proche de celle de Voyage, avec l’ombre d’Henlein qui plane sur cette prise en charge du transport spatial, à base de système D, par le secteur privé.
Mais parallèlement, des thèmes plus vastes sont ajoutés à ce tableau, le rendant riche et captivant : l’apparition d’un nombre anormalement élevé d’enfants surdoués, d’abord ; la menace d’une extinction de l’humanité à court terme, ensuite. Ce qui conduit les personnages principaux du roman à s’efforcer de réceptionner un hypothétique message de leurs descendants afin de trouver le moyen de contrer cette évolution... La dimension hard science de Baxter, faussement accessible, est rendue plus fluide par une narration qui alterne entre trajectoires individuelles un peu superficielles mais efficaces, et échos divers du contexte plus général. On peut de surcroît noter une originalité certaine : le fait que l’astronef, le Nautilus, soit piloté par un calmar géant, à l’intelligence artificiellement gonflée !
Avec la découverte d’un artéfact dans l’espace, véritable porte temporelle, on bascule dans des visions à la Stapledon, fidèles en esprit à celles de ce précurseur, mais nourries de tous les apports récents de l’astronomie et de la physique : vertige qui nous saisit en survolant la totalité de la vie de l’univers, où la vie « humaine » parvient toujours à subsister... On est ici plus proche des Vaisseaux du temps ou de Lumière des jours enfuis, écrit avec Arthur C. Clarke. Si la suite de la narration se fait moins vaste, revenant provisoirement à des considérations plus terre à terre, on retrouve peu à peu des enjeux voisins de ceux des Coucous de Midwich ou du roman de Clarke Les enfants d’Icare. Les pages se densifient progressivement, et les explications scientifiques relativement complexes tendent à plomber quelque peu le récit, avant que le final ne nous réconcilie avec la démesure de Baxter.
A contrario d’un Asimov, qui estimait plus que probable l’existence d’autres formes de vie dans l’univers, l’auteur anglais postule la solitude de l’humanité, et replaçant cette dernière, dans une visée humaniste et matérialiste, au centre de tout, il en vient à lui attribuer un rôle -subi ou conscient- qui peut difficilement être dépassé par son ampleur...