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La dernière jouissance

samedi 17 novembre 2007, par Maestro

Renée DUNAN (1892-1936)

France, 1925

France-Edition, 280 pages.

Encore plus méconnue que Jacques Spitz ou Régis Messac, voici Renée Dunan, auteur touche-à-tout, ayant publié de l’érotique, de la poésie ou de la SF. En dehors de cette diversité, elle doit sans doute à son engagement politique très marqué -dadaïste, elle fut ensuite anarchiste- d’avoir été négligée par les spécialistes d’un genre dont elle ne figurait qu’à la marge. Pourtant, La dernière jouissance entretient bien des points communs avec les romans français de cette période de l’entre-deux guerres. Roman post-apocalyptique, il nous décrit d’emblée les ravages provoqués par l’ouverture de la croûte terrestre le long de l’Amérique occidentale, avec entre autre l’apparition d’un gaz mortel, le nécron, causant la mort par des « sueurs de sang ». L’humanité plonge alors dans le chaos social et voit ses représentants diminuer de manière drastique. Le seul espoir réside dans un petit groupe d’intellectuels, seuls capables de trouver une solution pour échapper à l’asphyxie programmée de l’atmosphère : pour ce faire, ils se constituent en une caste de maîtres absolus, les Mille, et soumettent plus de dix millions d’inférieurs à une condition de sous-prolétaires rationnellement surexploités, surveillés et terrorisés, afin qu’il parviennent, par leur travail industriel, à repousser la menace du nécron.

Si l’imagination de Renée Dunan n’est pas loin d’égaler celle d’un Spitz dans ses descriptions impersonnelles du cataclysme, le récit, qui repose par la suite sur deux des plus puissants Mille, manque de surprise et d’originalité. Assez logiquement, c’est à la lutte entre la révolution et la répression orchestrée par l’élite dirigeante que nous assistons, avec en filigrane la critique du capitalisme réellement existant à l’époque de l’auteur, jusqu’au travestissement idéologique de la réalité (ici, sur la nature environnant la prison industrielle de Paris). Toutefois, et c’est là un autre point commun avec les romans de SF de l’entre-deux guerres, Renée Dunan, bien qu’anarchiste comme Régis Messac, fait preuve d’un curieux pessimisme : non contente de présenter le leader de la révolution sous un jour particulièrement détestable (un personnage n’hésitant pas à entraîner, en cas d’échec, l’ensemble de l’humanité avec lui dans la mort), elle laisse les deux personnages principaux, pourtant chefs de la police (sic !), devenir le seul espoir de l’avenir de l’espèce, dans un retour à l’état naturel qui n’est sans doute pas étranger aux convictions naturistes de Dunan.

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