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PRIMER
Le téléphone ne sonne pas toujours deux fois.
samedi 10 mai 2008, par
Shane CARRUTH (1972-)
Etats-Unis, 2004
Shane Carruth, David Sullivan, Casey Gooden, Anand Upadhyaya
Primé au festival de Sundance en 2004, Primer est un film de SF pour le moins atypique, pas tant pour le sujet qu’il aborde, le voyage dans le temps et ses paradoxes, que pour son traitement.
Hors de leurs heures de travail dans une grande boîte, un quatuor peu homogène de jeunes ingénieurs invente de nouveaux procédés, faits de bric et de broc, qu’ils font breveter avec l’espoir d’arrondir leurs fins de mois. Au cours de l’élaboration d’un super-conducteur à haute-température [1], deux d’entre eux, Abe et Aaron, découvrent que leur machine fait remonter le temps à son contenu sur une durée équivalente à celle passée dans la machine. Ce qui suppose soit dit en passant que la machine soit mise en route une durée équivalente de temps avant qu’on y introduise quelque chose. Bien évidemment, ils finissent par construire dans un box de garde-meuble, deux containers grâce auxquels ils remontent dans leurs passés en toute connaissances des évènements qui se sont produits (les cours de la bourse notamment...). La tentation devient rapidement grande de ne pas se contenter des cours de la bourse mais d’intervenir aussi dans leurs vies ou celles de leur entourage. Le danger du paradoxe n’est cependant jamais loin, surtout qu’un téléphone portable ne sonne jamais qu’une fois...
Comme tout voyage temporel, l’intrigue présente le risque de la complication, risque recherché même dans Primer où le principe même du voyage crée le paradoxe temporel. Ainsi, la machine doit être mise en route par minuteur sinon son usager risque de se voir en sortir alors qu’il vient juste de la démarrer [2]. De même pendant que la machine tourne, l’usager a fortement intérêt à éviter tout contact - comme répondre au téléphone portable par exemple - parce qu’il est lui-même déjà en train de se balader en ville puisqu’il a remonté le temps. Simple non ?
Non effectivement, cela ne l’est pas forcément. Et le réalisateur a tout fait pour ne pas faciliter la tâche du spectateur. La réalisation - d’une sobriété absolue dans ses moindres détails, jusqu’à la tenue des personnages, toujours la même : chemises blanches que la chaleur et l’activité extraient du pantalon aussi noir que leurs cravates - ne s’embarrasse pas d’explication en dépit de la voix off d’une communication téléphonique faisant office de narrateur ponctuel. Les dialogues, non moins sobres et même elliptiques, usent à l’occasion de termes techniques et scientifiques qui ont fait dire du film qu’il était le premier film hard science jamais réalisé, ce qui n’a pas été sans susciter des débats chez les fans du genre.
Au final, on ne comprend pas toujours ce qui se passe, qui fait quoi et quand. Le film est donc à voir et à revoir pour les aficionados du voyage temporel ou ceux qui aiment comprendre les choses compliquées, mais il est vivement conseillé de ne pas le regarder en état d’ébriété à moins de vouloir y trouver une causalité surréaliste, et je conseillerai presque de le regarder en version française, si celle-ci existe et si elle est bien faite.
[1] Un procédé qui permet la super-conductivité électrique à une température supérieure à -196°C
[2] Pourquoi ? Comment pourquoi ? Mais parce que la machine fait remonter une durée de temps équivalente au temps passé dedans et que vous ne pouvez pas sortir d’une machine qui ne marche pas. Si vous mettez la machine en marche 6 heures à l’instant A avant d’y entrer à l’instant B, vous pourrez y passer 6 heures et vous retrouver ainsi au moment A. C’est pourtant simple crénom !!!!