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LA MONTAGNE SACREE

samedi 9 juillet 2011, par Maestro

Alejandro JODOROWSKY (1929-)

Mexique, 1973, La Montaña sagrada

Alejandro Jodorowsky, Horácio Salinas, Zamira Saunders

Alejandro Jodorowsky est un personnage, un artiste aux multiples facettes, sans doute plus connu ces dernières années comme scénariste de BD, avec des séries comme L’incal ou La caste des méta-barons. Sur le plan cinématographique, les amateurs de SF ont sans doute davantage à l’esprit sa tentative d’adaptation de Dune. Pourtant, La montagne sacrée a aux yeux de certains le statut de film culte, à la fois ésotérique et troublant. Son film s’inspire très librement du roman avant-gardiste de René Daumal, La montagne analogue, rédigé durant la Seconde Guerre mondiale.

Il s’agit en réalité d’une succession d’images, où les dialogues succèdent aux nombreuses onomatopées, et à travers lesquelles on retrouve l’ancrage surréaliste de Jodorowsky (très belle scène où, de la blessure de personnes fusillées, s’échappent des oiseaux). L’histoire, difficile à décrypter, semble surtout relever du parcours initiatique. Pèle mêle, sont dénoncés la violence des Européens face aux Amérindiens (non sans outrance, le parallèle étant sous-entendu avec le nazisme), celle du pouvoir face au peuple (le souvenir de la répression, en 1968, de la contestation étudiante mexicaine est sans doute encore vif), le voyeurisme, le règne des apparences, le commerce de la mort ou de l’art, la militarisation de la société et le conditionnement nationaliste des individus, l’aliénation (intéressante perversion de l’architecture sous la forme de banlieues dortoirs – mouroirs), mais également la religion chrétienne (et juive dans une moindre mesure), puisqu’avec beaucoup d’irrévérence, certaines scènes caricaturent des représentations sacrées traditionnelles ou prennent au pied de la lettre certains rites (manger le corps du Christ, par exemple). La provocation est ici reine, et ce vieillard libidineux retirant son œil de verre pour l’offrir à une enfant prostituée suffit à le prouver (un clin d’œil à Georges Bataille ?). Que dire également devant cette utilisation des excréments humains en pierre philosophale ou des testicules comme gage d’initiation, sinon qu’on verse facilement dans la posture gratuite et vaine, dans la bouffonnerie scatologique et franchement facile...

Mais on retrouve également des thématiques qui ont connu une brève heure de gloire dans les années 68, liées à la sexualité libre, à la communion retrouvée avec la nature et surtout à la quête de nouvelles spiritualités. Le personnage de départ s’apparente ainsi à un simili Jésus, et l’abondance de symbolisme tous azimuts résonne comme une gnose outrancière et boursouflée. Sans oublier la fascination de Jodorowsky pour le tarot. La mise en abyme qui clôt le métrage ne suffit d’ailleurs pas à compenser la platitude de l’ultime message, celui de l’amour comme seule voie vers l’éternité. Au final, on hésite entre le film abscons et donc génial parce qu’incompréhensible, ou le grand n’importe quoi à base de collages délirants… Mais n’est-ce pas finalement la même chose ?

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