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Un bonheur insoutenable
Un paradis d’enfer ?
samedi 12 juillet 2008, par
Ira LEVIN (1929-2007)
Etats-Unis, 1970, This Perfect Day
J’Ai Lu, collection Science-fiction, 384 pages, 1972.
Ira Levin est l’auteur d’Un bébé pour Rosemary, adapté à l’écran par Roman Polanski (avec le succès que l’on sait), et Les femmes de Stepford qui a fait l’objet de plusieurs adaptations dès 1975 (par Bryan Forbes, The Stepford Wives) et encore en 2004, par Frank Oz, sous le titre Et l’homme créa la femme (avec le succès limité que l’on sait). Un bonheur insoutenable s’inscrit dans la veine des dystopies, brillamment réactivée dans la décennie des années 70 que ce soit au cinéma ou dans la littérature, tous pays confondus. On peut même sentir son influence à plus long terme dans un film comme Equilibrium, pourtant sorti plus de trente ans plus tard.
Dans un avenir incertain, le monde est désormais unifié sous la houlette d’un super ordinateur, UniOrd. Ce dernier contrôle l’intégralité de la vie des habitants, choix du logement, affectation professionnelle, validation de l’union sexuelle, choix d’un des rares prénoms possibles pour les enfants, et chacun est soumis à des injections régulières de produits destinés non seulement à la protection médicale, mais aussi à la contraception et surtout au nivellement des sentiments par le biais de calmants et tranquillisants divers. On sent ici tout ce que le roman entretient comme liens avec Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley. Dans cette société uniforme mais apaisée, on suit le sort de Li RM35M4419, alias Copeau, de l’enfance à l’âge adulte, un individu qui, sous l’influence de son grand père, se pose des questions et finit par rencontrer d’autres personnes échappant volontairement mais en partie aux traitements chimiques. Ecrit dans un style fluide, Un bonheur insoutenable se lit avec grand intérêt, d’autant que des rebondissements renforcent le suspens, même si les problématiques qu’il développe ne sont que fort peu originales.
La critique sous jacente est relativement générale, une ode à la révolte, contre tout ce qui peut contrôler nos vies, aussi bien mécaniquement qu’humainement, au risque de devoir supporter les travers de la personnalité humaine. On n’est pas si loin d’un relatif anarchisme de droite, d’autant que les seules personnes invoquées au panthéon de cette société pseudo égalitariste sont Jésus et Marx (renforcés par le logo de la société pseudo parfaite mêlant la croix et la faucille) : on peut sans trop de risque y voir une condamnation du communisme, suspecté d’être négateur de l’individualisme, et du christianisme, sans doute trop pacifiste et non violent (tout au moins dans une de ses formes primitives).