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C’ETAIT DEMAIN
Ce sera hier
dimanche 17 mars 2002, par
Nicholas MEYER (1945-)
Etats-Unis, 1979, Time after Time
Malcolm McDowell, David Warner, Mary Steenburgen
Voilà un film de science-fiction qui réussit le challenge d’être à la fois basé sur un scénario original, adaptant le roman de Karl Alexander, et s’afficher comme une réussite honorable. Nicholas Meyer, réalisateur de l’inoubliable The Day After, Star Trek-La colère de Khan et Star Trek-Terre inconnue, a ici réussi à marquer de son empreinte le cinéma de SF, avec un long métrage qui constitue un véritable hommage aux débuts de la littérature de SF anglaise de l’époque victorienne, tout comme un Christopher Priest en littérature avec La machine à explorer l’espace. Tout commence dans le Londres de 1893, lors d’un diner organisé par H. G. Wells avec certains de ses amis, dont le chirurgien Stevenson (clin d’œil probable à l’auteur de L’étrange cas du dr Jekyll et de M. Hyde). Dans un parallèle amusant avec le roman La machine à explorer le temps, l’auteur explique à ses invités qu’il vient de mettre au point un appareil capable de transporter un homme dans le passé ou le futur. Mais la soirée se termine par une intrusion de Scotland Yard, à la recherche de Jack l’éventreur : on découvre à cette occasion que Stevenson et Jack l’éventreur ne font qu’un, et que celui-ci a fui vers l’avenir à bord de l’invention de Wells, en 1979... L’écrivain part donc à sa poursuite, et se retrouve dans le San Francisco de 1979, débarquant au cœur d’une exposition qui lui est consacrée...
Passons sur l’aberration de ce déplacement spatial, qui contredit et le roman de Wells, et les explications du début du film, s’expliquant avant tout par la volonté de toucher plus facilement le public américain... Le grand intérêt de ce métrage, au-delà de la fuite plutôt originale vers le futur de ce tueur qui est supposé avoir écrit que « Le XXème siècle était né avec lui », réside dans la confrontation de la mentalité et des convictions socialistes de Wells avec la réalité contemporaine. La veine de l’humour n’est pas suffisamment exploitée, et l’accent est mis sur la progressive déception de Wells face à un avenir violent. Ainsi que le déclare l’éventreur lui-même, « L’avenir m’a rattrapé et va encore plus loin que moi »". Par ailleurs, le fait que Wells, imprégné d’une mentalité toute victorienne et puritaine, se fasse draguer par une employée de banque est une situation tout à fait cocasse ! Ce qui est dommage, toutefois, c’est qu’à partir de ce moment-là, on tombe dans le schéma d’une histoire d’amour plutôt traditionnelle, avec la sympathique Emmy qui se retrouve à jouer le rôle de monnaie d’échange entre Wells et un Stevenson désireux de quitter cette époque, mais qui a besoin pour ce faire d’une clef possédée par l’inventeur.
On reste donc en partie insatisfait par le fait que Wells n’apparaisse alors plus que comme un amoureux maladroit mais sincère, sans son côté politique, et sans qu’il y ait une réflexion pourtant possible sur l’influence de notre présent sur l’écriture de ses romans passés mais à venir... De même, arrêter l’histoire avec le retour de Wells dans son époque d’origine, accompagné de son aimée, nous prive d’un autre décalage tout aussi intéressant... Des effets spéciaux plus proches du dessin animé (mais assez rares) ne suffisent pas à gâcher un film de bonne facture, mais qui n’exploite pas complètement une vraie bonne idée, laissant le spectateur quelque peu sur sa faim. Simplement divertissant, alors qu’il aurait pu s’agir d’un vrai chef d’œuvre...