Les compagnons de l’ombre - 3

Jean-Marc LOFFICIER (1954-)

France, 2009

Black Coat Press, collection "Rivière blanche", 308 p.

ISBN : 978-1-934543-47-4

Parmi les nombreuses et précieuses sorties de chez Rivière blanche, la série des Compagnons de l’ombre en est déjà à son troisième volet. Cette anthologie, traduite à partir de son équivalent d’outre-Atlantique, Tales of the Shadowmen, s’articule autour d’un concept également décliné par le récent L’effroyable vengeance de Panthéra : faire se téléscoper des personnages de la littérature populaire ou de la culture cinématographique, en une joyeuse partouze de l’imaginaire !

Se croisent ainsi les vampires, Nestor Burma, des hors-la-loi tous droit venus du far west, la mythologie lovecraftienne ou Arsène Lupin. Fort heureusement, en fin de volume, chaque nouvelle a droit à une liste de ses divers personnages agrémentés des noms de leurs créateurs originaux, car les connaissances exigibles pour une compréhension pleine et entière des détournements et réutilisations sont larges… Au programme, de l’aventure, des combats, non sans une bonne rasade d’humour. Parmi les nouvelles les plus savoureuses, on peut citer « La marque de Kane » de Kim Newman, récit foisonnant où des « drôles de dames » s’efforcent de déjouer les menées du Kane immortalisé par Orson Welles, servant également ici de repoussoir du capitalisme (en particulier avec ses fast foods bien peu appétissants !). La galerie de personnages mobilisée par Brian Stableford pour « Le sauvetage du Titan » force également le respect, dans une ambiance fin de siècle plutôt bien restituée à travers des dialogues fournis et prenant, le tout sur fond de la machine à faire parler les morts d’Edison… De même, « Ex Calce Liberatus » de Matthew Baugh, présentée sous forme d’échanges épistolaires (une forme qui n’est pas nécessairement très crédible au vu de la proximité des dates, mais qui demeure assez séduisante), est un croisement prenant entre Arsène Lupin et la légende arthurienne, sans aucun temps mort.

Plus original, John Shirley, avec « Les deux panaches de Cyrano », place l’action en plein cœur du XVIIème siècle, alors que la quasi-totalité des textes se place entre les mitans des XIXème et XXème siècles ; par le biais d’un petit raccourci temporel, il fait se rencontrer et s’affronter d’Artagnan et Cyrano de Bergerac, la philosophie de ce dernier étant bien respectée, avec au passage la condamnation assez logique de l’assassinat individuel pour changer l’Histoire… Si « Vingt mille ans sous les mers », de John Peel, apparaît moins original, son récit d’un Némo confronté aux ruines toujours vivantes de R’lyeh embaume un parfum de crédibilité certain. L’impact de « La couronne du chaos », où apparaît Robur, est moindre, quand bien même son aventure à la Indiana Jones demeure tout à fait plaisante. Les seuls petits regrets concernent quelques fautes de syntaxe ou d’orthographe qui subsistent malgré tous les efforts des traducteurs.