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Ignis

samedi 21 février 2009, par Maestro

Didier de CHOUSY

France, 1883

Terre de Brume, collection Terra Incognita, 2008, 298 p.

ISBN : 978-2-84362-381-3

A l’instar de Charlemagne Ischir Defontenay, honoré par le second titre de cette précieuse collection d’archéologie littéraire, Didier de Chousy fait partie de ces étoiles filantes d’une SF en pleine découverte d’elle-même, puisque Ignis est son unique roman dans le genre. Paru l’année de la mort de Karl Marx, il s’inscrit globalement dans le scientisme et le positivisme de l’âge industriel, encore bien imprégné d’ambiance religieuse, et servi d’ailleurs par une plume lyrique.

L’auteur imagine en effet le percement d’un puits dantesque au nord de l’Irlande destiné à atteindre le feu central, afin d’exploiter cette énergie colossale en une étonnante anticipation de la géothermie (une idée partiellement reprise par Conan Doyle dans sa nouvelle « Quand la Terre hurla »). Cette œuvre sans précédent s’effectue dans le cadre de l’économie capitaliste, alors en plein essor. Une société anonyme est fondée dans ce but, qui sait d’ailleurs mettre à profit une communication redoutable afin de s’attirer le plus grand nombre d’actionnaires. On retrouve également une mentalité européocentriste typique de l’expansion coloniale -l’utilisation de nègres bien peu considérés- et un mépris de la classe ouvrière propre aux élites bourgeoises d’alors (ainsi de cet échange transparent à la page 147, au sujet des ouvriers morts durant les travaux de terrassement ).

Il faut toutefois reconnaître à Didier de Chousy une ironie constante qui tend à relativiser ces limites majoritaires d’une époque. L’humour est en effet fréquent, tranquillement distillé, entre autre à travers la variété des formes, le récit narré par un des protagonistes laissant de temps à autre la place à de pseudo documents, invitation ou compte-rendu d’assemblée générale. Surtout, l’auteur sait au détour d’un page se lancer dans des développements aussi imaginatifs qu’emplis de prescience. Il en est ainsi de son hypothèse d’une Terre future ravagée par une industrialisation à outrance et les maladies qu’elle génèrera infailliblement, ou des progrès de la chimie qu’il entrevoit, vers la découverte de l’ADN…

Dans la seconde partie de son roman, qui voit une cité quasiment idyllique s’étendre autour du puits, en une version positive de la Stahlstadt de Jules Verne dans Les 500 millions de la Bégum (publié en 1879), Didier de Chousy imagine diverses inventions, telle cet ancêtre de la webcam actuelle ou des tapis roulants pour le déplacement des piétons. Il met surtout en scène une race de créatures mécaniques chargés des travaux des champs et de toutes les tâches les plus contraignantes, des robots baptisés ici Atmophytes. Leur révolte est l’occasion de retrouver les accusations traditionnelles à l’égard des insurrections populaires, visant tout particulièrement les mécaniques femelles et accusant tous ces insurgés de se livrer à l’ivresse ! Ignis n’en demeure pas moins le témoignage précieux d’une époque, jalon d’une littérature en pleine adolescence…

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