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Valcrétin

samedi 20 mars 2010, par Maestro

Régis MESSAC (1893-1945)

France, 1943

Ex Nihilo, 2009, 174 p.

Valcrétin est le dernier roman écrit par Régis Messac avant sa disparition en camp. D’abord édité par Jean-Claude Lattès, tout comme Quinzinzinzili et La cité des asphyxiés, au début des années 1970, il est republié par la Société des amis de Régis Messac dans une version plus fidèle au manuscrit original.

Valcrétin s’inscrit dans la veine de ces explorations de mondes perdus et de terres encore inconnues, une découverte ici habilement justifiée par le constat de l’existence de routes maritimes identiques pour tous les navires, remarque encore plus valable en notre âge de mondialisation tous azimuts. Sur une île inconnue localisée au large du Chili, un équipage a donc découvert une sous espèce humaine dégénérée, qui intéresse de près le basque richissime Corrabin, financier d’une expédition comprenant son ami Le Bret, le narrateur, et son patron, le professeur Baber. Parvenus sur place, les explorateurs s’efforcent d’apprivoiser ces spécimens d’humanité et de mener sur eux des expériences visant à les faire sortir de l’animalité. Le parallèle avec L’île du Docteur Moreau est ici sensible.

On a là une nouvelle déclinaison de ce à quoi peut être conduite une humanité laissant libre cours à ses pulsions autodestructrices, sa tension vers la barbarie, ainsi que l’illustrait déjà Quinzinzinzili. Certes, Valcrétin est globalement moins abouti, mais son actualité pessimiste ne fait aucun doute, ainsi qu’en témoigne son narrateur, dans une proximité évidente avec celui de Quinzinzinzili. L’île est d’ailleurs répugnante non seulement par ses autochtones, mais également en raison d’une végétation tout aussi dégradée, comme un reflet de ce que l’humanité peut faire de la nature. Il faut d’ailleurs reconnaître à Régis Messac un talent certain dans ses descriptions d’un écœurement proprement tactile. Mais au-delà de cette interprétation, on sent également à travers la brève description de la hiérarchie des crétins une critique de la gérontocratie, et peut-être de la figure du Pétain d’alors, ainsi qu’une dénonciation du colonialisme. Inversant le mythe du bon sauvage, Messac en vient à défendre implicitement un certain relativisme culturel, face au constat d’échec de toute tentative d’éduquer d’autres peuples par la force.

Sans être un texte majeur, Valcrétin n’en conserve pas moins une actualité certaine, en plus d’une valeur particulière due à son statut d’ultime œuvre de son auteur.

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