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LE CHOC DES TITANS (2010)

samedi 8 mai 2010, par Maestro

Louis LETERRIER (1973-)

Etats-Unis, 2010, Clash of the Titans

Sam Worthington, Liam Neeson, Ralph Fiennes.

La perte de créativité d’Hollywood, sensible depuis déjà plusieurs années, se confirme avec ce nouveau remake, le film original datant de 1981. Bien sûr, c’est au niveau visuel que le fossé est gigantesque : finis les trucages image par image, la synthèse s’en donne ici à cœur joie, transcendée par l’utilisation de la 3D. Cela nous vaut de bien belles scènes, ainsi de cette cité d’Argos édifiée sur les parois d’une véritable cuvette côtière, l’apparence de Charon, qui fait littéralement corps avec sa barque, ou la séquence du combat face à Méduse, particulièrement fluide et impressionnante. Néanmoins, la réalisation des affrontements, comme bon nombre de films récents, est tellement rapide qu’elle en devient illisible, voire même fatigante. On est ici plus proche de 300 que du premier film.

Le scénario est dans ses grandes lignes identique, à quelques variantes près. Persée, fils de Zeus, est donc maudit par son beau père, tout comme sa mère, qui se débarrasse d’eux en les enfermant dans un coffre jeté à la mer. La sanction divine transforme le meurtrier en personnage difforme, équivalent du Calibos du premier film. Si la mère ne survit pas à l’épreuve, l’enfant est recueilli par une famille de pêcheurs et grandit jusqu’au jour où les souverains d’Argos décident de se passer de la tutelle des dieux : la destruction de la statue de Zeus bâtie sur le rivage entraîne la réaction des dieux, et provoque accidentellement la mort de la famille adoptive de Persée (parents et petite sœur). Demi-dieu, celui-ci est épargné, et ramené dans la cité rebelle. La malédiction qui est ensuite lancée sur Argos l’orgueilleuse condamne la cité à la destruction, à moins que la princesse Andromède ne soit sacrifiée au Kraken. Persée et plusieurs guerriers d’Argos sont donc envoyés en expédition, d’abord auprès des trois sorcières, qui leur révèlent le point faible du Kraken : pouvoir être pétrifié par le regard de Méduse. Sur le chemin qui les mène ensuite au royaume des morts, ils devront faire face à des scorpions géants, rencontreront des djinns pour les aider et surtout affronteront la gorgone.

Tout cela s’enchaîne de manière très linéaire, sans qu’un véritable suspens ne parvienne à se mettre en place. Quelques clins d’œil au premier film sont présents (la chouette mécanique que Persée trouve en s’équipant, le bruit de serpent à sonnette émis par Méduse…), mais ils ne suffisent pas à rendre le métrage passionnant, d’autant que le jeu du principal acteur est à peu près aussi expressif que celui de Steven Seagal ! Surtout, l’idéologie qui semble se faire jour au fur et à mesure est plus que contestable. Alors que Persée, tel Arion, semble au départ souhaiter se révolter contre la tutelle des dieux de manière générale, ce qui l’amène d’ailleurs à refuser d’utiliser l’épée magique offerte par son père, il finit par s’opposer seulement à Hadès, acceptant la supériorité divine. La montagne accouche ici d’une souris, avec en prime un contresens complet opéré sur la mythologie grecque : Hadès incarne en effet un dieu mauvais, jaloux de son frère, concentrant tous les attributs du diable, d’autant qu’il est souverain des enfers. Le genre d’erreur qu’un élève de sixième digne de ce nom ne devrait plus pouvoir faire à l’issue de son année scolaire ! Ce manichéisme est renforcé par la quasi-inexistence des autres dieux, puisque seuls Apollon et Poséidon ont droit chacun à une unique -et courte- réplique ; nul cadeau offert par Aphrodite ou Athéna, comme dans le premier film, le seul présent étant celui de Zeus, tandis que le bouclier qui sauvera la vie de Persée est forgé par l’homme. Et ce n’est pas la participation de Io, caution féminine de l’expédition (et récompense du guerrier à la fin), qui permet d’infirmer ce constat.

Pire, l’inclusion des djinns, totalement hors sujet, car relevant de la mythologie arabe, résonne comme un écho de la situation géopolitique contemporaine. Alliés des guerriers grecs contre Hadès, ils incarnent ces « bons musulmans », ou ces talibans modérés avec lesquels la coalition dirigée par les Etats-Unis est prête à s’allier contre les terroristes, ces derniers partisans du même genre de violence aveugle qu’Hadès. Le choc des titans laisse place au choc des civilisations. Le fait que le réalisateur soit français ne change absolument rien à cette donnée, tant les immigrés de fraîche date, ainsi de Roland Emmerich, semblent mettre un point d’honneur à incarner l’idéologie étatsunienne plus efficacement que les natifs…

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