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Futurs au présent

samedi 3 juillet 2010, par Maestro

Philippe CURVAL (1929-), anthologiste

France, 1978

Denoël, coll. "Présence du futur", 320 p.

Dans la floraison d’anthologies en tout genre qui naquirent durant cette seconde moitié des années 70 (Retour à la Terre, Univers chez J’Ai Lu ou les volumes de Kesselring), celle que Philippe Curval supervisa (sans livrer aucune nouvelle de sa plume) avait comme objectif et principal intérêt de faire découvrir dix-sept jeunes auteurs débutants, dont certains ont connu par la suite un beau parcours (Brussolo, en particulier, avec « Funnyway », un texte mineur mais déjà d’un glauque suintant, transformant la bicyclette en instrument de torture). Le bilan, à la lecture, est toutefois relativement mitigé.

Certaines nouvelles possèdent un fond éminemment critique sur l’époque, sans que le style ne soit spécialement transcendant. « Histoire de Dan Olphin », de Jean-Pierre Vernay, est ainsi une critique du sport de compétition comme élément de l’économie capitaliste, avec son nageur d’exception obtenu par manipulation génétique, sans respect de l’individu et de son épanouissement ; une anticipation des Olympiades truquées de Joëlle Wintrebert. Daniel Martinange se révèle plus concluant, avec son choix de narration d’une humaine retournée à l’état sauvage après un embrasement nucléaire (le touchant « La nuit des chiens »). Sympathique, « Programmation » est une efficace évocation du conformisme de nos sociétés, à travers le sort d’un robot ne sachant pas qui il est.

D’autres embaument un parfum de nostalgie de l’âge d’or de la SF anglo-saxonne, tels ces « Horizons perdus » d’Antoine Aubin, qui, avec ses visions oniriques, ne sont pas sans évoquer un Planète interdite. De même, Jean-Marc Ligny dans « Artésis comment ? » décrit la rencontre entre un jeune scientifique et une jeune fille amnésique qui, en dépit d’anticipations pertinentes sur la vie quotidienne du futur (ordinateur au domicile, caméras et surveillance accrus), se termine par un clin d’œil temporel qui offre la victoire aux forces de l’Axe…

Enfin, une dernière catégorie est essentiellement axée sur le style, au risque de demeurer abscons. Il en va ainsi de « Tendu à mort, l’arc immobile du désir », de Pierre Ziegelmeyer, une histoire d’amour qui reste relativement obscure, à travers laquelle on devine cependant une critique de la tendance à se réfugier dans des univers virtuels alors encore balbutiants. Il en est de même pour Catherine Goldman (« Pochcryptum »), évocation extrêmement allusive du traumatisme post cataclysmique ( ?), ou de Dominique Warfa, dont le « Rituel pour un homme claustré » est très inspiré des réflexions sur le temps d’un Jeury.

Passons également assez rapidement sur les textes de Danielle Fernandez (« Le grand voyant »), de Gérard Coisne (« Raid sur Monaco ») et de Julie Montanié (« Tremblement de terre », plus proche du fantastique dans son évocation de la Roumanie stalinienne). Dans cette veine, on appréciera davantage le « Face à face » avec Johanne Marsais, revanche assez crue de l’altérité, du mutant, à l’égard de l’humanité conformiste. De même, « Tchaomort, les hebdodos », de Jean-Benoît Thirion, est une gouleyante satire du divertissement télévisuel, qui anticipe sur la télé réalité d’aujourd’hui, ses aspects les plus violents et son voyeurisme, avec en prime une simplification de la langue. Quant au « One man show » de Francis Jacomin, tout simplement délirant, et « La nuit tous les chats sont gris » d’Alexis Hamon, mise en abyme de la tâche d’écrivain, ils sont les seules véritables déclarations d’humour du recueil.

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