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Royaume-Desuni
samedi 13 novembre 2010, par
James LOVEGROVE (1965-)
Grande-Bretagne, 2003, Untied-Kingdom
James Lovegrove, apparu dans le paysage français avec Days, livre ici un roman post-apocalyptique a priori évocateur de ses célèbres ancêtres, Wyndham ou Christopher. En réalité, à l’instar d’un Robert Charles Wilson sur l’autre rive de l’Atlantique, James Lovegrove s’intéresse avant tout à ses personnages, et le véritable royaume-désuni, c’est ici le couple formé par Fen et Moira. La narration est d’ailleurs double, avec une police différente pour chacun.
Suite à la naissance de jumeaux mort-nés, leur belle histoire s’est en effet enlisée dans les sables de la dépression pour elle, de la prise en charge pour lui. En raison de l’attaque de leur petite communauté par une bande de casseurs, les Bulldogs londoniens, Moira se retrouve prisonnière dans leur quartier général, promise au bon vouloir du chef suprême. Fen, de son côté, décide de partir la délivrer, et son expédition laborieuse sera ponctuée d’étapes aussi variées qu’improbables, dans une société en pleine déliquescence.
L’Angleterre est en effet au ban des nations, isolée de l’Ecosse, du Pays de Galles et de la Cornouailles devenus indépendants, et occasionnellement bombardée par la communauté internationale. Néanmoins, les raisons de cette situation ayant conduit à l’effondrement des structures sociales, à la loi du plus fort et au refuge en petits groupes, demeurent très vagues, et James Lovegrove ne distille les informations qu’au compte-goutte, sans jamais approfondir ce qui ne reste qu’une toile de fond très grossière. On saura seulement qu’une décision politique malencontreuse, le « Pari malchanceux », semble avoir provoqué la faillite du pays, le relâchement des structures sociales et la condamnation de l’étranger.
Dans ces conditions, les parallèles faits sur la quatrième de couverture avec 1984, Un bonheur insoutenable ou Le meilleur des mondes sont totalement hors sujets. La lecture est indéniablement plaisante, mais la réflexion politique se limite à une critique des politiciens ; elle est ici essentiellement un prétexte à raconter une histoire d’humains tout à fait normaux, pris dans la tourmente, avec quelques trouvailles frappantes (la communauté des Saltéristes, formée par des lecteurs fanatiques d’un auteur secondaire, qui voient dans l’interprétation de ses romans une orthodoxie rassurante) et un certaine affection pour son pays. Finalement, Royaume-Désuni est un honnête roman de mœurs, mais certainement pas un chef d’œuvre de la science-fiction.