Arche

Stephen BAXTER (1957-)

Royaume-Uni, 2009, Ark

Presses de la Cité, 2010, 600 p.

Arche est la suite directe de Déluge, le précédent roman de ce géant actuel de la SF qu’est le britannique Stephen Baxter. L’intrigue marque d’ailleurs un retour en arrière, et l’on revit la progressive montée des eaux sur Terre en suivant les parcours de quelques individus, membres du gotha et de la bourgeoisie mondiale pour l’essentiel, et plus particulièrement leurs rejetons. Ce beau monde combine en effet fortune et intelligence, au point d’élaborer un projet de nouvelle arche afin de permettre à l’humanité de survivre sur un autre monde. Les premiers chapitres du livre ont donc un côté redondant avec Déluge, qui certes facilite la soudure, mais se révèle un peu poussif, d’autant que la reprise en main du programme par ce qui reste du gouvernement étatsunien ressemble fort à une réédition du programme spatial historique, à l’instar de ce qui avait déjà pu être exposé dans Voyage. Les développements autour des relations fusionnelles, voire franchement douteuses, au sein de la minorité d’élus pressentis pour l’expédition maintiennent néanmoins l’intérêt, en dépit d’une enquête policière amenée quelque peu artificiellement.

Toutefois, l’approche de l’embarquement à bord de l’astronef voit une accélération de l’action et une intensification de l’intérêt du lecteur. Si l’odyssée jusqu’à Jupiter, afin de rassembler suffisamment d’antimatière pour créer la bulle de distorsion, puis le voyage vers la Terre II sont traités par quelques arrêts sur image, leur dimension profondément réaliste est à souligner, quand bien même Baxter ait tendance à privilégier les relations interpersonnelles sur les modèles sociaux ou les idéologies de chacun (l’opposition Kelly / Wilson est traitée bien trop brièvement). On retrouve en tout cas les habituels développements hard science, ici à base de distorsions temporelles permettant de franchir les abîmes d’années lumière séparant notre soleil des autres étoiles.

En réalité, passé le premier tiers du roman, on retrouve tout le talent de Baxter et on se laisse emporter par son traitement captivant d’un thème classique de la SF , parsemé de quelques très bonnes idées : les règles du jeu d’échecs infinis, les problèmes de la reproduction et de l’équilibre psychologique à bord de l’Arche, les rares éléments sur le nouvel art (trop isolés, malheureusement) ou la réactivation du projet Orion de la fin des années 1950 (l’envoi d’un engin dans l’espace à grands coups d’explosions atomiques successives !). Et malgré l’hypothèse bien peu crédible d’un retour de certains sur Terre, le roman se clôt sur une note d’espoir qui donne envie de lire un troisième tome !