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La route

samedi 19 février 2011, par Maestro

Cormac McCARTHY (1933-)

Etats-Unis, 2008, The Road

On a beaucoup parlé de ce nouveau roman de l’écrivain étatsunien reconnu, Cormac McCarthy, qui a d’ailleurs rapidement fait l’objet d’une adaptation cinématographique. Au point que soient publiées deux éditions en format poche : l’une traditionnelle, l’autre de luxe. Et il faut dire que cette dernière est particulièrement classieuse, arborant une couverture métallisée qui évoque furieusement celles de la mythique collection Ailleurs et demain, dirigée par Gérard Klein. Même les pages intérieures sont cernées de noir, la couleur des cendres dont il est régulièrement question dans le livre. Pourtant, en dépit de ces atours significatifs, vous aurez beau chercher le terme de science-fiction, vous ne le trouverez nulle part ! Un comble, car l’appartenance de La route au genre ne souffre ici d’aucune ambiguïté.

L’histoire est d’une franche simplicité, en plus de suivre un scénario relativement linéaire. Un père et son jeune fils sont parmi les rares survivants d’une catastrophe qui semble avoir exterminé la quasi-totalité de la population mondiale. Leur existence n’a pour seule raison d’être que leur survie, la recherche de nourriture et le voyage au long de la route vers la mer. Le roman est donc la chronique de leurs difficultés quotidiennes, confrontés qu’ils sont aux rudesses du climat, à l’hostilité de leurs semblables (versant souvent dans le cannibalisme) et au manque d’aliments et d’eau potable. La catastrophe, qui n’est jamais explicitement identifiée ni décrite, ressemble en effet fort à un hiver nucléaire, et la nature a tout autant souffert que l’humanité, à l’opposé de l’hypothèse écologique privilégiée par Jean-Pierre Andrevon dans la nouvelle « Le monde enfin ».

A priori, rien que de très conventionnel pour les amateurs de SF, cette histoire de survivants de la fin du monde ayant été maintes fois explorée par les auteurs. Au-delà des points communs que l’on peut faire, à un siècle de distance, avec un roman comme Le nuage pourpre de M. P. Shiel, on peut relever que la vision de l’humanité en ce début de XXIème siècle est un brin plus sombre encore, l’individualisme nourri au sein de nos sociétés capitalistes interdisant ici pratiquement toute compassion ou générosité à l’égard de semblables qui ne le sont quasiment plus ; la mort des animaux et des végétaux fait pour sa part écho à la crise écologique contemporaine.

Néanmoins, malgré un sujet dépourvu d’originalité profonde, l’absence pratiquement totale de flashback sur les conditions du cataclysme et les modes de survie dans les premiers temps, et quelques incohérences (aucune radiation ne semble subsister dans les endroits atomisés, et on ne comprend pas vraiment pourquoi le père refuse de s’installer avec son fils dans l’abri littéralement paradisiaque sur lequel ils tombent), La route est un roman qui touche. D’abord par son écriture, à la fois fluide et ciselée, usant abondamment des « et », comme pour insister sur la répétition d’un quotidien simplifié, et dont les dialogues ne sont que légèrement individualisés, illustration d’un monde revenu à une nudité, une crudité et une uniformité saisissantes. Ensuite par la relation entre ce père et son fils, profondément humaine et touchante, un rayon de soleil que confirme heureusement le final du roman.

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