Accueil > BDSF > Jour J > Qui a tué le président ?
Qui a tué le président ?
samedi 16 avril 2011, par
Dessin : Colin WILSON (1949-)
Scénario : Fred DUVAL et Jean-Pierre PECAU
Couleurs : Jean-Paul FERNANDEZ
France, 2011
Delcourt, coll. "Néopolis", 58 pages.
Dans la série des Jours J, le lien qualitatif entre la couverture et l’intérieur semble décidément rarement avéré. Ce cinquième épisode, visuellement peu attrayant, est en effet le meilleur à ce jour ! Cette fois, la divergence repose dans les résultats de l’élection présidentielle de 1960, remportée par Richard Nixon. Le virage à droite de l’Etat se fait alors sentir, au point que l’on pourrait pratiquement parler d’un fascisme rampant : réduction de la liberté d’expression, répression contre la radicalisation étudiante et plus généralement d’extrême gauche (les Weathermen sont cités, leur leader étant dans cette trame parallèle Tim Leary), prolongement de la magistrature suprême à quatre mandats consécutifs, intensification des envois de troupes au Vietnam. Nixon, pour se débarrasser de la résistance communiste, non content d’envoyer deux millions d’hommes sur le terrain, envisageant de vitrifier la frontière avec la Chine afin de couper l’aide de cette dernière au Vietminh (une hypothèse qui semble un peu courte, les livraisons d’armes pouvant prendre bien d’autres itinéraires).
La force de cet album tient certes dans son intrigue, articulée d’une manière hachée autour de la préparation de l’attentat contre Nixon en 1973, mais également dans son graphisme, plus réaliste et cru, ainsi que dans son personnage principal, ancien hell’s angel engagé dans la sale guerre, aussi violent que déboussolé, prototype du lumpen prolétaire. L’intrigue est à la fois solide et charnelle, ce qui la rend d’autant plus crédible, les références à l’histoire alternative et au sort de certains individus célèbres ne versant jamais dans le didactisme ou le systématisme. Il en est de même pour les liens avec des films comme Apocalypse Now ou Platoon… Il est juste dommage que comme trop souvent en uchronie, tout repose sur les décisions d’un seul homme. Une BD poisseuse et sombre, dans laquelle le léger élément fantastique renforce plus encore l’attraction.