La cabane de l’aiguilleur

Robert Charles WILSON (1953-)

Canada, 1986, A Hidden Place

Gallimard, coll. "Folio SF", 2011, 274 p.

ISBN : 978-2-07-044124-2

A mesure de la renommée croissante de Robert Charles Wilson, avec le succès récent du doublé Spin / Axis, le lectorat français (re)découvre ses premiers romans, certes moins cosmiques dans leur ambition, mais qui témoignent déjà d’un sens de l’écriture affuté.

La cabane de l’aiguilleur, proposé en 2008 dans le recueil Mysterium de chez Denoël, transpire ainsi de cette humanité et, disons-le, de cet amour que l’auteur sait accorder à ses personnages, de cette compréhension qui concerne jusqu’aux plus détestables. A l’époque de la Grande Dépression, dans cette Amérique qui doute d’elle-même, nous voici projetés dans le quotidien d’une bourgade du cœur des Etats-Unis, incarnation de toutes les pesanteurs propres à la société étatsunienne profonde. Travis y est un élément étranger, arrivé de l’urbanité suite au décès de sa mère, contrainte de se prostituer. Accueilli par sa tante, sous condition de travailler dans la fabrique de glace de son oncle, il partage leur maison avec Anna Blaise, une jeune fille aussi charmante qu’introvertie. Celle-ci, victime du harcèlement sexuel de l’oncle, semble en effet dissimuler le secret de ses origines. Travis, qui a trouvé un réconfort chez Nancy, elle aussi en marge de cet univers aussi conservateur et puritain en apparence qu’hypocrite en réalité, va alors tout faire pour en savoir davantage. Et puis il y a l’Os, vagabond filiforme qui voyage au hasard en suivant les trains, doté de pouvoirs d’apparence surhumaine. Peu à peu, la vérité va se dévoiler, plus proche du fantastique que de la SF.

Il y a du Simak dans ce roman, dans l’empathie de l’auteur pour la vie et la paix, et si la thématique générale ne se distingue pas par son originalité -l’ouverture à l’autre, l’anticonformisme et la pleine réalisation de soi-, la sensibilité de Robert Charles Wilson suffit à susciter l’adhésion.