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Les enfants de Masterton
samedi 3 septembre 2011, par
Marc BAILLY
France, 2011
Black Coat Press, coll. "Rivière blanche", 252 p.
ISBN : 978-1-61227-035-7
Nouvelle anthologie de Rivière blanche, qui laisse une large place à ce support véritablement essentiel aux littératures de l’imaginaire, Les enfants de Masterton compile en fait les nouvelles lauréates du prix Masterton, mis en place par Marc Bailly il y a onze ans. Les neuf textes (mais où sont les lauréats de 2006 et 2010 ?) sont classés par ordre chronologique, le recueil comprenant également une préface de Graham Masterton lui-même ainsi qu’une présentation des auteurs.
« La roche aux fras », de Michel Pagel, élément de son cycle de la Comédie inhumaine, explore la dimension légendaire de l’île d’Yeu, à l’instar de ce que l’auteur a pu faire ultérieurement avec Le roi d’août ou Les mages de Sumer. Des personnages à la psychologie convaincante, une bonne dose d’humour irrévérencieux à l’égard des religions, font de ce texte un agréable moment de lecture. Il en est de même pour « Un choix réfléchi » de Sylvie Miller, croisement d’une destinée suivant le sens du courant et du double visible dans le miroir, « Les maléfices du temps » de Michel Rozenberg et sa matérialisation de la peur du vieillissement, ou « Le survivant », de Philippe Ward et Sylvie Miller, touchante évocation d’un bluesman ayant conclu pacte avec le diable, la musique contre son amour (cette nouvelle avait initialement été publiée dans l’anthologie Rock Stars).
« Dragons, renards et papillons », d’Armand Cabasson, se distingue grâce au choix de son cadre, le Japon du XVIème siècle, et à son propos presque poétique, revanche des femmes, ces éternelles victimes de la guerre. Superbe nouvelle également que « Notre-dame aux écailles », de Mélanie Fazi, où l’angoisse mortifère du cancer se trouve transcendée à travers ces statues aussi mystérieuses que magnétiques, à la fois refuge possible et antithèse d’une prose oh combien empathique. On atteint là au sommet de l’anthologie, tout comme avec le texte de Francis Berthelot, « Le serpent à collerette », magnifique évocation de l’inceste entre une jeune fille et son beau-père sous forme d’un conte aux belles trouvailles. « Cadavres exquis » d’Anne Duguël alias Gudule marque par sa vision nuancée de la nécrophilie, mais trop court, il ne parvient pas à s’imposer aussi durablement que la chanson « Réveille-toi » du groupe Ange sur le même thème. Ce n’est pas le cas de « Séparation de corps », signé Richard D. Nolane, un texte atroce, à l’image de ce qu’a accompli le personnage, qui se retrouve châtié par là où il a péché (la nouvelle avait donné son nom au recueil de l’auteur paru chez Rivière blanche). Diversité et efficacité sont ainsi les marques d’une anthologie de haute volée.