Accueil > TGBSF > U- > Utopiales 2010
Utopiales 2010
samedi 8 octobre 2011, par
Jérôme VINCENT (dir.)
France, 2010
ActuSF, coll. "Les trois souhaits", 228 p.
ISBN : 978-2-917689-27-1
Pour la seconde année consécutive, les éditions ActuSF, ayant succédé à L’Atalante, sont donc le relais éditorial officiel du festival des Utopiales de Nantes. Le programme est toutefois plus copieux que pour le cru 2009, puisque pas moins de huit nouvelles sont proposées. L’ensemble est introduit par Pierre Bordage, et médiocrement illustré par une couverture criarde, œuvre d’un Philippe Druillet que l’on a connu plus inspiré.
Deux textes sont en fait des rééditions. Celui de Larry Niven, « Reviens, Carol ! », qui date de 1966, est un récit de hard science avant l’heure, puisqu’il décrit des capacités de téléportation réellement existantes et surtout leurs cruelles limites physiques… Une histoire frappante, dans tous les sens du terme. « Le chasseur de jaguar », signé Lucius Sheppard, date quant à elle de 1985, et se révèle être une plaisante évocation de l’importance des traditions, du fantastique heurté par la modernité à travers les atours du réalisme fantastique latino-américain.
Pour ce qui concerne les inédits, le bilan est également majoritairement positif. Peter Watts, nouvelle valeur montante de la SF anglo-saxonne, propose avec « La chose » un retournement complet de la problématique du film éponyme de John Carpenter, puisqu’il met en mots les pensées de la forme de vie extra-terrestre : une empathie qui nous démontre finalement la supériorité du prétendu monstre, capable de lutter contre l’entropie. Un brillant exercice de style.
Autre grand moment, « La fête de la comète », de Juan Miguel Aguilera, un récit onirique envoutant que l’on aurait aimé voir davantage développé, une métaphore de ce carrefour des possibles du XXème siècle entre fascisme et utopie révolutionnaire (prise ici sous son angle le plus artistique, le moins risqué aussi). Quant à « Le vieux cosmonaute et l’ouvrier du bâtiment rêvent de Mars », de Ian McDonald, il se révèle profondément touchant, véritable métatextualité quantique autour de la planète rouge, la figure attachante de l’ancien cosmonaute étant toutefois plus réussie que celle du jeune Indien, qui manque de chair humaine.
En fait, les trois textes plus faibles sont ceux de Vincent Gessler, Thomas Day et Justine Niogret. « Miroirs du ciel », du premier, est certes agréable, langoureux même, mais ce tableau attractif d’une civilisation autre est pénalisé par une trop grande proximité avec les Fremen de Frank Herbert et un dénouement relativement attendu, avec son message d’ouverture à l’altérité. « La ville féminicide », de Thomas Day, basée sur un fait divers prometteur -une ville mexicaine où les chiffres de disparitions de femmes explosent-, est gâchée par un excès de violence gratuite et généralisée. Enfin, « Les rivages extrêmes de la mer intérieure » fait prévaloir une forme soignée, poétique, sur un fond par trop abscons.