Le grand silence

Loup DURAND (1933-1995)

France, 1994

Enfant, Saorge a été confié par sa mère à l’hôpital du docteur Gatineau près du lac Saint-Jean, pour soigner sa maladie mais aussi pour le protéger. Elle a tout organisé en prévision de sa disparition à elle, grâce à sa fortune. Saorge grandit à l’écart des Hommes, en lisière de l’immensité canadienne antichambre du Grand Nord. Il grandit dans la solitude car il souffre d’une maladie qui pour beaucoup serait un don mais l’amène à se voir comme à un monstre : Saorge est capable de lire les pensées des animaux. Le jour où l’apprend un milliardaire vieillissant, mais prêt à soutenir les projets les plus étranges, la vie de Saorge est bouleversée. Si Saorge peut lire les pensées des animaux, il doit pouvoir lire celles des Hommes. Sa liberté est dès lors menacée. La traque commence par une tentative de séduction qui réussira trop bien ; elle se poursuivra jusque dans la Terre de Baffin.

Dernier roman de Loup Durand, Le grand silence est une incursion dans le fantastique des plus réussies. Les éditions, notamment celle en poche chez Presse Pocket, le présentent en insistant beaucoup sur le suspens de l’histoire, une chasse à l’homme dans un monde hostile. Pourtant, c’est d’abord un roman sur l’altérité, écrit dans un style qui n’est pas sans rappeler les Plus qu’humains, mêlant la subjectivité des différents personnages et développant ainsi un fort sentiment d’empathie entre le lecteur et le héros.

Mais l’innocence de Saorge, en dépit des pensées qu’il capte et à cause de son isolement, fait de lui quelque part un enfant de 25 ans. Cette innocence et son étrangeté lui attirent la sympathie à l’instar de L’enfant du 5e Nord.
La nature avec laquelle Saorge communique n’a rien de l’idyllisme hippie. C’est le Wild cher à Jack London.

A la croisée de Sturgeon, de Pierre Billon et de Jack London, Loup Durand a écrit un petit chef d’oeuvre, son dernier livre.