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SNOWPIERCER, LE TRANSPERCENEIGE

samedi 16 novembre 2013, par Maestro

BONG Joon-Ho (1969-)

Corée du Sud, 2013

Chris Evans, Song Kang-Ho, Ed Harris, John Hurt, Tilda Swinton, Jamie Bell

Apportons d’emblée une précision importante : par manque de connaissances sur le sujet, je ne ferai aucune comparaison entre le film et la bande-dessinée française dont il est issu, datant du début des années 1980, et par là contemporaine de la série de romans La Compagnie des glaces, avec laquelle elle partage certains points communs.

L’action du long métrage se déroule en 2031, une quinzaine d’années après que la communauté internationale ait tenté de briser la spirale du réchauffement climatique par l’injection dans l’atmosphère d’un gaz censé ramener les températures à un degré acceptable. Las ! La solution s’est finalement révélée pire que le mal, puisque la Terre est entrée dans une nouvelle ère glaciaire. Les seuls survivants apparents de l’humanité sont les passagers du Transperceneige, un immense train qui fait continuellement le tour du monde, œuvre d’un industriel génial, Wilford. Toutefois, à bord, règne une ségrégation spatiale poussée. Dans la queue du train, une nouvelle révolte se prépare, sous l’égide de Curtis, et le spectateur suit son odyssée pour remonter jusqu’à la locomotive, en compagnie de ses compagnons d’infortune, parmi lesquels le concepteur des portes du train et sa fille, tous deux sérieusement drogués.

Le Transperceneige -superbe titre au demeurant- est en apparence un nouveau film post-apocalyptique, qui décline les thèmes traditionnels du genre, la violence autodestructrice, la volonté de survivre, l’accentuation des inégalités, et l’espoir d’un nouveau départ ; s’y ajoute également une référence transparente à l’arche de Noé, avec son aquarium ou sa serre, l’ours blanc remplaçant ici la colombe de la Bible. Mais une lecture possible du métrage tient surtout à sa fonction de fable politico-sociale. Le train est en effet une métaphore appuyée, volontiers baroque et clownesque, du capitalisme. Ses soutiers sont des miséreux, des sans-grades, contraints de se nourrir de protéines à l’origine douteuse, voire même des enfants devenus esclaves de la Machine, belle image allégorique, et l’ordre est ici poussé à son extrême, le ridicule et le cynisme servant le message du film (avec ce clin d’œil à la chaussure envoyé vers la tête de George Bush junior), visant à démontrer l’inanité de la fameuse formule de Margaret Thatcher, « There is no alternative »…

Car caricature il y a, ciblant le prix de la victoire révolutionnaire, via une esthétisation troublante et volontiers fascinante de la violence, ou surtout le mode de vie des privilégiés, à travers des tableaux grotesques, qui d’un wagon restaurant de première classe à l’ancienne, qui d’une boîte de nuit ou d’une salle de classe aux imbuvables élèves. Le dénouement du métrage aborde également des thèmes classiques de l’histoire des luttes révolutionnaires, celui du nouveau pouvoir pouvant potentiellement remplacer l’ancien en se coulant dans un moule identique, ou la collaboration entre bourgeois et dirigeants du mouvement ouvrier…

Les incohérences repérables, telle la quasi inutilité des passagers du bas de l’échelle sociale ou la gratuité du cannibalisme, qui ne fait que gonfler inutilement une intrigue suffisamment forte en elle-même, ne sont donc pas l’essentiel, et Le Transperceneige s’avère à la fois prenant émotionnellement et stimulant intellectuellement.

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