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Dimension chevalerie chinoise

samedi 31 mai 2014, par Maestro

Romain d’HUISSIER & Nicolas HENRY

France, 2014

Black Coat Press, coll. "Rivière Blanche", 288 p.

ISBN : 978-1-61227-284-9

Voilà une nouvelle parution de l’excellente collection Fusée chez Rivière blanche qui s’avère à la fois surprenante et passionnante. Jusqu’à présent, Romain D’Huissier nous avait surtout habitué à sa maîtrise de l’univers des super-héros d’Hexagon, pour lesquels il a supervisé rien moins que deux anthologies et deux romans, dont nous avions dit en leur temps tout le bien que nous en pensions. Il nous révèle désormais qu’il est aussi un passionné de culture chinoise, et plus particulièrement du cinéma et de la littérature d’aventure, que l’on connaît surtout en France par le biais de bon nombre de films et de rares romans (Au Bord de l’eau, de Shi Nai’An, principalement). L’anthologie s’ouvre d’ailleurs par deux très utiles et érudites mises au point sur le sujet : la première, de Nicolas Henry, sur « La littérature de chevalerie chinoise  », la seconde, de Romain D’Huissier, sur « Le cinéma d’arts martiaux chinois ». Quant aux fictions, elles sont d’une homogénéité qualitative assez remarquable !

Les hostilités débutent en fanfare par une nouvelle de Nicolas Henry, « Le jade brisé  », qui possède tous les éléments susceptibles de connaître une adaptation en court-métrage : une jeune fille désireuse de venger son père, général mort au combat contre un chef barbare, afin d’épargner son jeune frère ; un chevalier qui va l’épauler dans sa mission impossible, réussissant davantage à mettre des femmes dans son lit que des adversaires dans la tombe ; un conteur collant, générateur d’une distanciation et d’un humour irrésistible ; un vieux maître, retiré par dégoût des morts infligés en série, qui décide finalement de reprendre du service pour l’honneur. L’action est trépidante, les scènes de combat efficacement rendus, et la prose fleurie nous plonge d’emblée dans un cadre qui demeure pour nous, Européens, exotique et magique. « Sacrifice » de Romain D’Huissier est une autre variation sur ce thème phare de la vengeance familiale, plus sage, moins explosif, mais touchant dans cette histoire de relations triangulaires entre le frère mort, l’adversaire de celui-ci et sa sœur assoiffée de revanche.

«  Vengeance carmin » de Stéphane Treille présente l’intérêt, là encore autour de la vengeance d’un homme ayant perdu sa famille dans la répression de l’Etat mandchou, de s’interroger sur la spirale de la violence, et sur la vanité de l’action individuelle face à une possible révolution, mais le sujet laisse l’impression de ne pas avoir été pleinement exploité, la fin étant particulièrement abrupte. Un des plus beaux textes est celui d’Estelle Faye, jeune auteure qui monte. « Madame Sang », en dépit du fait que le lecteur comprend très vite le fin mot de l’histoire, permet de confronter le mythe et la réalité autour de la fascination pour une puissante guerrière portée -dans tous les sens du terme- par un lettré frustré. Convaincant et positif, qui trace un parallèle séduisant entre art culinaire et art du bretteur. Le niveau est le même pour « Le palais de jade » de Nelly Chadour, touchante histoire d’un guerrier déclinant et d’un conteur juvénile, confrontés à un clan de brigands -dont quelques figures plutôt originales- opérant sur la route de la soie, qui ne peut laisser indifférent.

Dans une veine plus portée sur le fantastique, on trouve « Disques de jade dans la forêt de bambous », signé Laure André, un conte tout en finesse, en dentelles, replongeant dans une tragique histoire d’amour dont est issu le principal protagoniste de l’histoire, spectateur plus qu’acteur, face à des femmes à la forte personnalité. Ghislain Morel, avec « Oeuf de phénix, cœur de démon », développe un univers explosif et visuel proche de celui de Nicolas Henry, croisant avec beaucoup d’énergie et d’efficacité les ambiances de westerns et de films de zombies… Krystoff Valla est un des seuls à placer son récit, « Le serment », dans un contexte historique plus précis, celui de l’avènement de Qin Shi Huangdi, le Premier Empereur, et si son histoire évoquera inévitablement le film Hero, le cadre choisi et le duel personnel et idéologique à la fois parviendra à conserver l’intérêt intact. « Sans un regard  », de Julien Heylbroeck (complice de Romain D’Huissier pour les Dimensions Super-héros précédemment évoqués), décline un thème intéressant, celui de la peur nourrie par un sinistre fait divers perpétré dans un village chinois lambda, mais le traitement de l’intrigue, avec affrontement et rencontre d’un maître et de son futur disciple, demeure trop traditionnel. A l’inverse, Jean-Luc Boutel, que l’on connaissait plutôt en passionné de merveilleux scientifique, parvient à se faire plus original dans « Le dernier combat », sa quête aux ambiances très lovecraftiennes connaissant une conclusion inattendue et prometteuse, en forme d’hommage à la Shaw Brothers


Pour commander Dimension chevalerie chinoise suivez le lien vers les éditions Black Coat Press !

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