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EX_MACHINA
dimanche 4 septembre 2016, par
Alex GARLAND (1970-)
Royaume-Uni, 2015
Avec Oscar Isaac, Alicia Vikander, Domhnall Gleeson, Sonoya Mizuno.
Caleb, un employé d’une entreprise d’informatique, Blue Book (transposition apparente de Google) est tiré au sort par une loterie interne. Son gain ? Un séjour dans un centre de recherche ultra sécurisé et isolé en pleine nature. Il y rencontre Nathan, son patron, véritable génie qui vient de mettre au point une parfaite intelligence artificielle, tout au moins en apparence. Revêtue d’une identité féminine, elle se prénomme Ava (réplique d’Eve), et Caleb va passer une semaine à la rencontrer afin de valider un test de Turing amélioré, les différentes sessions rythmant l’avancée du métrage. Dans ce cadre en apparence idyllique, Caleb va peu à peu découvrir que la réalité n’est pas ce qu’elle semble être. Des coupures de courant inopinées se produisent, et c’est à l’occasion de l’une d’elles qu’Ava conseille à Caleb de se méfier de Nathan… Mais de qui réellement se méfier ? Des sentiments quasi-amoureux semblent également naître entre Ava et Caleb. Et tous les individus présents sont-ils ce qu’ils prétendent et croient être ?
L’atout d’Ex_Machina, c’est d’abord une indéniable beauté visuelle. Le cadre naturel dans lequel le centre de recherche robotique est installé est tout simplement superbe (le tournage a eu lieu en Norvège), tout comme les locaux eux-mêmes, véritablement mêlés à l’extérieur (les larges baies vitrées, les roches apparentes). Il y a déjà, dans un tel décor, un reflet de la difficulté de séparer nature et culture. Quant à Ava, elle est d’un design à la fois sobre et léché. La combinaison de sa voix et de son apparence, ce visage lisse et pourtant si expressif, produisent un charisme voulu. Le parallèle entre d’un côté Nathan et sa domestique asiatique, dénuée de la parole et lui servant à assouvir ses envies sexuelles, de l’autre Caleb et Ava, à la relation plus sincère, interroge sur la localisation de la vraie machine… L’originalité de la genèse de cette IA, loin d’être la première en science-fiction, c’est qu’elle a été façonnée grâce aux moteurs de recherche, que Nathan qualifie de « grille de lecture de la façon de penser des gens » ; il s’est également servi des portables de la planète entière afin de pouvoir reproduire les expressions du visage.
Finalement, Ava ne serait-elle pas un avatar de la Singularité, le fruit de ces nouvelles technologies du numérique qui ont totalement modifié notre perception du monde ? Variation sur le conte Barbe-Bleue, véritable histoire dans l’histoire, Ex_Machina est un film aussi épuré (quatre acteurs suffisent à la tension dramatique) que réfléchi, un huis-clos qui s’inscrit dans la lignée d’un Blade Runner ou d’un Homme bicentenaire, questionnant la possible humanité des intelligences numériques arrivées à un certain seuil d’évolution, et le point déterminant permettant de s’en rendre compte : sentiment, machiavélisme… Un seul point pose problème : la non prise en compte, dans le scénario et la programmation, de la toute première loi de la robotique énoncée par Isaac Asimov. En dehors de cette limite, Ex_Machina est un très bon film sur un sujet qu’il ne révolutionne cependant que modérément.