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Messager des tempêtes lointaines
dimanche 18 septembre 2016, par
Pierre PELOT (1945-)
France, 1996
Denoël, coll. "Présence du futur", 288 p.
Pierre Pelot fut, dans le domaine de la science-fiction, un des auteurs les plus prolixes et les plus inspirés des longues années 1968 (voir les recueils Delirium Circus chez Denoël ou Orages mécaniques chez Bragelonne), poursuivant cette production encore dans les années 1980 (Parabellum Tango ou le cycle des Hommes sans futurs), avant de se diversifier et de délaisser la science-fiction, à une époque où celle-ci entrait en crise éditoriale. Son retour en 1996 coïncide justement avec l’émergence d’une nouvelle génération d’auteurs et d’un renouveau certain du genre en France.
Messager des tempêtes lointaines prend place dans un futur qui, sur le plan technologique tout au moins, ne semble guère éloigné dans l’avenir. Le monde a toutefois connu un traumatisme aussi profond qu’obscur, les guerres dites enterrées, qui ont laissé derrière elles des sites dangereux et une population de parias, les Pénitents, présentés comme les descendants des fauteurs de guerre, et dont la mémoire a été totalement oblitérée. Marine, jeune fille accorte et rebelle, en fait partie, et sa vie bascule le jour où son équipe d’ouvriers découvre un complexe souterrain pouvant peut-être permettre de révéler un passé masqué. Malheureusement, les autorités prennent très vite le contrôle du chantier, en dépit des mouvements de foule que cela suscite, jusqu’à ce qu’un soir, Marine assiste à une explosion de lumière en provenance du complexe, et soit sauvée par un homme amnésique comme surgi du néant. Marine fuit alors avec lui, qu’elle prend pour le Sauveur annoncé de son peuple, tandis que le gouverneur bascule dans une répression tous azimuts et la société dans une révolution chaotique où chacun devient l’ennemi de tous.
Messager des tempêtes lointaines n’est pas sans évoquer le roman Kid Jésus, vertébré également par une forme de millénarisme et par un passé effacé, mais au fil du déroulement de l’intrigue, on se plait également à évoquer le souvenir du Sourire des crabes (le road trip qui vire au massacre) ou des Barreaux de l’éden et Canyon Street (la réalité truquée), la prose de Pelot étant ici à la fois plus policée et moins sauvage. L’univers décrit, qui prend place dans un cadre typiquement lorrain (les Vosges ou Metz), s’avère également trop peu approfondi ; on en retiendra essentiellement l’idée d’un nouvel essor religieux via un syncrétisme monothéiste exclusif, et celle d’une colonisation de l’espace par le biais de projections holographiques. Mais la dominante de ce roman est assurément d’une profonde tristesse, tristesse d’hommes souffrant de leur âge, de leurs handicaps, tristesse d’hommes contraints d’accomplir un devoir qui les consume (des hommes sans futurs ?), et tristesse finale de cet exilé espérant encore sauver son aimée depuis longtemps disparu…