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L’Odyssée d’Amos (Les Chroniques d’Ataraxia, 1)
dimanche 23 décembre 2018, par
Thierry MAUGENEST (1964-)
France, 2018
TohuBohu éditions, 304 p.
L’Odyssée d’Amos est présentée comme le premier volet d’un cycle ou d’une série prenant place sur la planète Ataraxia, un monde créé par François Bournaud et mis en mots par Thierry Maugenest, écrivain aguerri. Cette planète a été colonisée il y a près d’un millénaire par rapport au déroulement du roman, à partir d’une souche de voyageurs originaires de la Terre, aidés par une banque génétique.
Cette occupation s’est toutefois faite suivant une charte déontologique bien précise, visant à créer un modèle opposé à celui, industriel et capitaliste, qui est le nôtre. Plusieurs principes fondateurs sont à suivre, en particulier un respect de l’écosystème ataraxien (ce qui n’empêche d’ailleurs pas certains humains de pratiquer des croisements végétaux…) et une absence totale de système monétaire, jugé par essence maléfique. D’autre part, la famille est dissoute dans la communauté, puisque seules les mères sont identifiées, les enfants étant élevés par le clan / la tribu. Il y a, dans cette structure sociale, une forme criante de régression, de retour vers un nomadisme pré-néolithique, avec un système dirigeant – ou plutôt de surveillance – élitiste, puisque les sages se cooptent entre eux (et gardent une main-mise secrète sur la technologie héritée de la Terre, dénonciation d’une bureaucratie transcendante ?).
Ce monde, nous le découvrons par le biais du sort réservé à Amos, brillant sujet humain, qui, au moment où il doit intégrer l’instance sociale supérieure, se voit désavoué et contraint de fuir afin de comprendre qui a agi dans l’ombre à ses dépens. Dans sa quête de la vérité, il est aidé par plusieurs de ses proches, et par son attachement aux règles fondamentales d’Ataraxia. Car l’origine du complot destiné à l’écarter (mais pourquoi lui spécifiquement, présentait-il un si grand danger potentiel ?), et qui laisse dans ses pas une succession de morts violentes, plonge ses racines dans un naufrage survenu vingt ans auparavant. Et c’est un mal pouvant contaminer l’ensemble de la société ataraxienne qui est en jeu, une vision dynamique et axée sur l’idée de progrès s’opposant à l’utopie, ici fondamentalement statique et autosuffisante. L’intrigue se suit assez aisément, non sans quelques contradictions (pourquoi l’ennemi d’Amos ne s’est-t-il pas servi du système de surveillance généralisée pour savoir combien de résidents se trouvaient sur l’île des proscrits ?).
En fait, ce qui semble transparaître, c’est une opposition excessivement binaire entre un mode de vie à la simplicité hédoniste, refusant toute technologie, et un autre qui, endossant la technologie, se corromprait de lui-même, gâchant toute possibilité de société égalitaire. Le livre est proposé dans une édition plutôt soignée, contenant des illustrations de certains éléments naturels ou techniques d’Ataraxia. Au rang des défauts touchant plus spécifiquement au cadre, justement, notons une carte d’Ataraxia trop petite (on a un peu de mal à déchiffrer certains noms), une faune et une flore manquant par trop d’exotisme, de dépaysement comparativement à la nôtre, et l’absence totale d’explications sur le pourquoi et le comment de la création de François Bournaud… Peut-être dans un second volet ?