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COLOR OUT OF SPACE

La couleur tombée du ciel

dimanche 1er novembre 2020, par Maestro

Richard STANLEY

Etats-Unis/Portugal/Malaisie, 2019

Avec Nicholas Cage, Joely Richardson, Madeleine Arthur, Elliot Knight.

Les adaptations de Lovecraft au cinéma ont souvent été peu concluantes, à quelques exceptions près (je pense bien sûr au fantastique Antre de la folie de John Carpenter). La dernière en date de la nouvelle La Couleur tombée du ciel, qui avait déjà fait l’objet de trois adaptations dans les années 1960 (Le messager du diable, avec Boris Karloff, une belle bouse), 1980 (La malédiction céleste, un autre sacré nanar, visible sur YouTube) et en 2010 (Die Farbe, film allemand en noir et blanc assez magnétique), n’est pas exempte de certains de ces défauts, mais possède également quelques solides atouts.

Le début du métrage est très fidèle à la nouvelle d’origine, avec une narration en voix off sur fond de paysages de forêts obscures, à la beauté froide et tenace. L’intrigue est centrée sur une famille, habitant depuis peu dans ces collines recouvertes par la sylve, les Gardner. Outre le père Nathan, joué par Nicolas Cage sur un mode délicieusement aliéné, on trouve la mère Theresa, en rémission d’un cancer, et les trois enfants : Lavinia, l’aînée, adepte de la Wicca ; Benny, le cadet, gentil et passionné d’astronomie ; Jack, le benjamin, plus facilement impressionnable. Sans oublier divers animaux, dont un élevage d’alpagas (!), et le vieil Ezra, un hippie squattant le terrain boisé avec sa chatte Point G (sic). Bien que le film soit ponctué par les interventions de Ward, l’hydrologue en mission dans la région (et noir, sympathique retournement des stéréotypes lovecraftiens), c’est surtout cette famille dont on suit la progressive déréliction.

Car si des phénomènes étranges ne cessent de se multiplier à partir de la chute d’une étrange météorite au halo mauve, c’est aussi l’impossibilité pour une cellule familiale de retrouver une forme (rêvée ?) de normalité et de stabilité à laquelle on assiste. Les atavismes générationnels semblent être plus forts (« Je ne suis pas un monstre, comme mon père », clame désespérément Nathan Gardner), et ce basculement progressif de tout un groupe dans la folie est d’une grande pertinence quant à la filiation lovecraftienne. La créature extra-terrestre ne joue alors qu’un rôle de révélateur de failles bien humaines, dans le fond.

La succession des anomalies engendrées par la fameuse « couleur tombée du ciel » scande le déroulement d’un film d’horreur présentant finalement une progression relativement classique : la mère qui se coupe deux doigts sans s’en rendre compte, le parasitage des communications, la transformation de la faune et de la flore, ou, plus intéressant, la modification de la perception du temps (potentialité qui n’est malheureusement qu’effleurée). Le plus glaçant, à cet égard, réside dans la créature résultant de l’exposition à la couleur de Jack et Theresa : on tient là un moment réellement glaçant, là où l’autre créature sise dans l’étable tient davantage de l’hommage à The Thing de Carpenter, chef d’œuvre lovecraftien dans l’esprit.

Les clins d’œil sont d’ailleurs multiples dans le film, du Necronomicon utilisé par Lavinia à Ward originaire de Providence et portant un tee-shirt de l’université Miskatonic, en passant par des prévisions météorologiques mentionnant Dunwich… Si certains éléments de la réalisation sont de pures réussites – l’image clef du puits, accès entre les profondeurs de la Terre, l’eau, et l’extérieur, le ciel étoilé ; les images brèves mais frappantes de la planète extra-terrestre – d’autres font sourire – certains effets spéciaux dignes des années 80, un kitsch détonnant dans ce contexte, et cette tendance à vouloir trop en montrer au lieu de simplement suggérer. Le retour de la narration pour les dernières minutes du métrage permet de conclure sur une note majoritairement positive, sans faire abstraction des vrais défauts et faiblesses d’un film réalisé par un descendant de l’explorateur Stanley…

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