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Time Salvager
dimanche 23 janvier 2022, par
Wesley CHU (1976-)
Etats-Unis, 2015
Fleuve éditions, coll. « Outrefleuve », 2021, 528 p.
A priori, Time salvager avait ce qu’il fallait pour me plaire puisqu’il mêle dystopie et voyage temporel. Dans la première, Wesley Chu plante son décor : l’humanité, quoiqu’ayant essaimé dans le système solaire, est condamnée. Des siècles de guerre ont achevé d’épuiser ses ressources depuis le XXIème siècle et la Terre est un champ de ruines sur lesquelles des communautés vivent mais le plus souvent survivent.
C’est ici qu’entre en jeu le voyage temporel. Pour subsister, l’humanité use du voyage temporel en projetant dans le passé des chronmen, chargés d’aller collecter de l’énergie, sous toutes ses formes, et des ressources sur le point de disparaître. Tel est le boulot du chronman James Griffin Mars, l’un des meilleurs de sa profession, en dépit de son alcoolisme qui lui permet d’affronter les horreurs dont il est le témoin et contre lesquelles il ne peut et ne doit rien faire. Car la préservation du chronflux passe avant tout et le respect des lois temporelles est assuré par les Contrôleurs. Jusque là James a réussi à survivre à sa mauvaise conscience et aux dangers physiques, mais alors que, sur la demande d’une mégacorporation, il est chargé de récupérer divers objets sur une plateforme flottant sur l’océan glacial arctique in extremis avant qu’elle ne sombre suite à l’explosion de son réacteur nucléaire, il rencontre la biologiste Elise Kim... et la ramène avec lui ! Violation manifeste de la première des lois temporelles qui fait du couple des fugitifs, mais peut-être est-il le dernier espoir de l’humanité pour soigner la Terre.
Il y avait pourtant de bonnes idées. Parmi lesquelles je retiens celle du viol volontaire des lois temporelles. Alors que la SF a longtemps mis en scène une police en charge du respect de ces lois, comme la fameuse patrouille du temps de Poul Anderson ou plus récemment le Tribunal des Variations Anachroniques de Loki, la mini-série Marvel, quand elle ne nous a pas confronté à des individus qui inconsciemment change le cours de l’histoire avec ou sans grand h, Wesley Chu imagine toute une organisation qui a hérité du voyage temporel et surtout il imagine la déviance d’un de ses membres.
Le côté dystopique est aussi intéressant, quoique déjà moins cohérent, car le lecteur ne comprend pas trop comment une humanité dépourvue de ressources parvient à se maintenir et surtout à se déplacer dans l’espace... en ramassant du petit bois ou en pillant un vaisseau juste avant sa destruction dans une bataille spatiale. Surtout que chaque événement visité devient territoire proscrit au voyage temporel ensuite. Peut-être la suite fournira-t-elle une explication en éclaircissant les agissements des mégacorporations. Car Time Salvager est le premier volet d’un diptyque dont la parution française du deuxième Time Siege n’est pour le moment pas annoncée. Dans la mesure où le premier tome ne se suffit pas à lui même et appelle à une suite, il faut espérer pour les fans que les Editions Fleuve ne conditionne pas la publication de la suite sur le succès en librairie du début.
En tout cas, ce n’est pas moi qui vais faire monter les ventes. D’abord, parce que personne ne me lit. Ensuite, parce que je ne vais pas faire l’éloge du roman de Chu. De fait la lecture de Time Salvager m’a été pénible, un vrai pensum en fait. Non pas qu’il soit mal écrit, - mais il n’est pas bien écrit non plus-, mais l’histoire n’avance tout simplement pas. Pire, les fils narratifs tirés sont des ficelles : pas besoin de venir du futur pour trouver louche l’explosion de la plateforme d’Elise, explosion dont l’événement est décrit comme étant le début de la chute de l’humanité ; l’idée qu’une biologiste, même assistée d’une génie ramenée du passé, puisse sauver la Terre a partir de matériels récoltés de bric et de broc a quelque chose de naïf qui fait penser que le roman s’adresse d’abord à un lectorat plus jeune. Sensation que la découverte ultérieure des éditions françaises des romans de fantasy de Wesley Chu chez PKJ, une collection jeunesse, n’a fait qu’accentuer. Certes, il est des romans pour la jeunesse qui sont passionnants... mais tout le monde ne s’appelle pas Rowling.