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Conan le sabreur
dimanche 10 septembre 2023, par
Lin CARTER (1930-1988), Lyon Sprague DE CAMP (1907-2000) & Bjorn NYBERG (1929-2004)
États-Unis, 1978, Conan the Swordman
Jean-Claude Lattès, 1983, 256 p.
Conan le sabreur a ceci de particulier qu’il se compose de différentes nouvelles, écrites tantôt par le duo Sprague de Camp / Bjorn Nyberg (l’auteur de Conan le vengeur, première suite « officielle »), tantôt par Sprague de Camp et Lin Carter. Chacun de ces récits prend place à des moments distincts de la vie du Cimmérien, en commençant par sa jeunesse. « Les légions de la mort » le place en effet juste après avoir été chassé de son pays natal, ayant rallié une troupe d’Aesirs, pendant des Vikings de notre monde. Le jarl, chef de la troupe, est à la recherche de sa fille, enlevée par une méchante sorcière hyperboréenne. On appréciera le manque d’originalité de l’intrigue, qui n’est pas sans évoquer le premier récit de Conan l’aquilonien. La fin est plus surprenante, frustrante même, dans la mesure où Conan, chevaleresque, permet à la captive de s’enfuir, le laissant aux mains de la sorcière pour on ne sait quel traitement…
« Le peuple des cimes », seule nouvelle à avoir été publiée antérieurement, se situe à l’époque où Conan était au service du vieux souverain de Turan. Là encore, comme dans nombre de récits les plus commerciaux de Robert Howard, le mercenaire doit délivrer une jeune femme forcément accorte, dont il souhaite toutefois se servir comme otage. La confrontation avec les survivants d’une race en voie de disparition aurait pu être plus intéressante, si elle n’avait pas été traitée de manière très superficielle et rapide. Dans « Les ombres de la nuit », Conan est général au service du royaume de Korajan, dont la reine est une autre superbe créature, maîtresse du Cimmérien. Entorse à l’esprit de la création d’Howard, ce dernier nourrit le secret espoir d’en devenir l’époux. Heureusement, l’intrigue principale s’avère plus intéressante, le sauvetage du frère de la reine s’effectuant en compagnie d’un voleur et d’un astrologue, avec un joli retournement de situation sur le dénouement.
Comme un écho jamais éteint, « L’Étoile de Khorala » voit Conan partir de nouveau en croisade afin de délivrer une femme jadis puissante, ancienne souveraine du royaume d’Ophir dont l’époux est tombé sous la coupe d’un noble (on sent une proximité relative avec le point de départ de Conan le boucanier). La nouvelle a ceci d’intéressant qu’elle nous présente Conan usant d’un artéfact propre aux voleurs, les pieds de dragon. Pour le reste, combat contre une troupe d’hommes en armes nettement supérieur mais en profitant des avantages du terrain, et victoire à l’aide d’un objet magique dont la légende ne manque pas d’incohérence (l’ancêtre de la reine déchue, titulaire de l’objet magique, ne l’aurait pas gardé sur lui jusqu’au moment de sa mort par traîtrise, permettant sa transmission aisée à ses descendants ?).
« La gemme dans la tour » est une aventure prenant place dans les débuts de Conan en tant que pirate des îles Barachan : il n’est alors que second de l’équipage, son capitaine ayant décidé de prendre pied sur le repaire insulaire d’un sorcier réputé, convaincu qu’il est de sa mort, afin de récupérer ses trésors, à commencer par une gemme magique. Mais les morts se multiplient, et plutôt qu’une origine onirique, ce que l’on croit un instant et qui aurait été nettement plus original, c’est à des représentants d’une ancienne race que l’on a affaire.
« La déesse d’ivoire » est sans aucun doute le plus improbable de tous les textes : suite directe de la nouvelle « Les joyaux de Gwalhur », on y retrouve Conan et Muriale reproduire la même ruse, s’exprimer au nom d’une divinité, mais d’une manière tellement peu crédible (laisser la prêtresse du lieu s’enfuir on ne sait où avant de se substituer à elle, sans s’inquiéter le moins du monde de la possibilité d’être ainsi démasqué !) qu’on n’y croit guère. La rencontre entre Conan et une véritable divinité voit le premier faire acte de contrition, là où le personnage d’Howard lui aurait plutôt asséné un bon coup de sabre… Enfin, « Lune de sang » se place dans un contexte proche de « Au-delà de la rivière noire », nouvelle confrontation entre les Aquiloniens, dont Conan est devenu un des chefs militaires, et les Pictes ; l’occasion de critiquer les nobles et leur autorité de naissance…