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LES EVADES DE LA PLANETE DES SINGES
Evasion à Singe-Singe !
mardi 4 septembre 2001, par
Don TAYLOR (1920-1998)
Etats-Unis, 1971, Escape the Planet of the Apes
Acteurs : Roddy Mac Dowall (Cornélius), Kim Hunter (Zira), Bradford Dillman (Lewis Dixon), Natalie Trundi (Stephanie Brandon), Eric Braenden (Otto Hasslein), Ricardo Montalban (Armando)
Après le chef d’œuvre qu’était La planètes des singes, puis sa suite inégale et globalement décevante Le secret de la planète des singes, qui se concluait par la destruction de la Terre, comment les producteurs et les scénaristes pouvaient-ils relancer la franchise ? Simplement par un renversement de perspective tout à fait passionnant, trois des singes de l’avenir se retrouvant plongés dans la réalité de nos années 70. Certes, l’artifice qui permet d’expliquer ce tour de passe-passe est quelque peu tiré par les cheveux : les deux vaisseaux humains s’étant écrasés dans les deux premiers films, il paraissait peu probable de les remettre en état.
La difficulté est contournée avec l’adjonction d’un savant chimpazé sans aucun doute surdoué, Milo, qui remet en état le premier astronef, mais se fait tuer par un gorille (en dépression nerveuse !) au début du film, ce qui permet de recentrer le propos sur le couple charismatique Zira-Cornélius. Le bond dans le passé est effectué par le passage dans une faille spatio-temporelle supposée, peut-être produite par la destruction de la Terre, ce qui amène les trois chimpanzés dans une situation similaire à celle de Taylor dans le premier film : mis en cage, considérés comme inférieurs, soumis à des tests et ne parlant pas par souci de ne pas montrer leur intelligence (et non par incapacité physique, comme Taylor).
On retrouve d’ailleurs dans ce film une scène du roman La planète des singes, utilisée à rebours : lorsque Zira doit empiler des cubes dans un certain ordre pour accéder à une banane suspendue, on pense inévitablement à l’exercice similaire qui était demandé à l’humain Ulysse Merou. De même, le plan qui précède le générique de début et qui voit les trois astronautes retirer leurs casques, révélant ainsi leur identité, évoque en partie la première chute du roman, même si l’impact en est nécessairement moins fort.
La première partie du film, à partir du moment où Zira et Cornélius montrent leur capacité à parler, est surtout dominée par l’humour : leurs interventions devant la commission d’enquête, leur façon de singer (sic !) les comportements humains... Ne peut-on d’ailleurs y voir une critique de certains aspects de nos sociétés contemporaines, avec la prégnance des médias (et leur importance dans la lutte politique), ou la consommation débridée, en passant par la violence gratuite de la boxe ? Reste que certains aspects annoncent la tragédie à venir, en particulier l’attitude méfiante du docteur Hasslein, qui symbolise le côté négatif de la science, Lewis Dixon en incarnant au contraire le côté positif. Le président de la commission d’enquête se situe sur le même plan qu’Hasslein, évoquant d’ailleurs Zaïus, avec son incrédulité et sa croyance en la supériorité absolue de l’être humain.
L’insouciance laisse donc très vite place à l’angoisse et à l’opression. Zira et Cornélius se retrouvent enfermés dans un camp militaire et questionnés de manière agressive et sauvage (utilisation d’un sérum de vérité, en particulier). D’ailleurs, est-ce un hasard si c’est par le biais de l’alcool, un des vecteurs de la destruction des Amérindiens, qu’Hasslein perce à jour le secret des deux singes ? On retrouve à cette occasion, par le biais de la conversation entre Hasslein et le président, le débat sur la possibilité ou non de changer l’avenir lorsqu’on le connaît : Est-il juste de tuer deux innocents pour assurer la survie de l’espèce humaine ? Aurait-il été juste de tuer Hitler alors qu’il était encore un enfant innocent ?
La décision de faire avorter Zira et de la stériliser, ainsi que Cornélius, contre leur volonté, pousse les deux chimpanzés à s’enfuir, avec l’aide ultérieure de Dixon. C’est là le moment le plus rythmé et le plus intense émotionnellement du film, qui se termine tragiquement, le final de loin le plus émouvant des cinq films de la série. Voilà en tout cas un long-métrage qui incite à la réflexion sur les traitements infligés aux animaux, et plus généralement aux minorités. Les évadés de la planète des singes se place ainsi à un niveau qualitatif quasiment égal à La planètes des singes (l’effet de surprise en moins), tout comme sa suite directe, La conquête de la planète des singes, largement annoncé dans Les évadés...