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La guerre des étoiles, épisode III
LA REVANCHE DES SITH
dimanche 29 mai 2005, par
George LUCAS (1944-)
Etats-Unis, 2005, Revenge of the Sith
Hayden Christensen, Natalie Portman, Ewan McGregor, Samuel L. Jackson, Christopher Lee, Ian McDiarmid
Dire de cet ultime épisode de la saga Star Wars qu’il était attendu est un euphémisme : les jeunes générations ayant été conquises par les épisodes récents, La menace fantôme et L’attaque des clones, espéraient que ce troisième volet allait clore avec brio la nouvelle trilogie, tandis que les nostalgiques de la première trilogie voulaient croire que George Lucas retrouverait l’inspiration des origines en livrant ce chaînon manquant entre les nouveaux films et les anciens, Un nouvel espoir, L’empire contre-attaque et Le retour du jedi. Fort heureusement, leurs espoirs n’auront pas été vains : incontestablement, La revanche des Sith est le meilleur volet de la nouvelle trilogie, et atteint le niveau des anciens épisodes, si tant est qu’une telle mise en perspective ait une quelconque raison d’être...
Quelques années après le début de la guerre des clones (une période que retrace avec beaucoup de succès et de fraîcheur le dessin animé Clone Wars), la République semble marquer des points décisifs face aux armées séparatistes menées par le Comte Dooku. Pourtant, ce dernier est parvenu, au début du métrage, à enlever le chancelier Palpatine sur Coruscant, ce qui introduit le film par une bataille spatiale dans la proche banlieue de la planète capitale qui restera dans les annales : rythmée, visuellement captivante, elle permet de retrouver Obi Wan Kenobi et Anakin Skywalker en mission de sauvetage, et d’apprécier à nouveau tout leur talent de chevaliers jedi. Retrouvant l’humour typique de Star Wars, en particulier à travers le personnage de R2 ou des répliques savoureuses, cette séquence culmine avec le duel contre Dooku.
Sans dévoiler la totalité de l’intrigue du film, disons que La revanche des Sith développe considérablement les relations entre Anakin et le chancelier, qui instille en lui le doute sur les jedi et l’espoir de pouvoir sauver son épouse Padmé d’une mort qu’il redoute. La scène dans la loge de l’opéra est à cet égard cruciale et particulièrement réussie, Palpatine nous offrant même une possible explication de la mystérieuse conception d’Anakin... Il faut dire que Padmé est enceinte, ce qui explique d’ailleurs son relatif retrait de l’action comparativement aux deux précédents épisodes. Après toute une partie durant laquelle se succèdent conversations entre Palpatine et Anakin, Anakin et Padmé, et au sein du conseil jedi, les choses prennent un tour nouveau, d’abord avec l’éloignement d’Obi Wan et Yoda, envoyés respectivement en mission à la poursuite du leader séparatiste Greevious et à l’aide des wookies, puis avec la reconnaissance à Anakin par le chancelier de sa maîtrise du côté obscur de la Force.
S’ensuivent des plans alternés de Padmé dans ses appartements et d’Anakin dans une salle du conseil jedi déjà terriblement vide, baignés par le crépuscule de Coruscant, passages sans paroles mais qui véhiculent une grande émotion dramatique. Car ensuite, les scènes d’anthologie se succèdent : la tentative d’arrestation du chancelier par les jedi, le combat entre Mace Windu et Palpatine, la naissance de Dark Vador, l’extermination des jedi, la fin de la menace séparatiste sur Mustafar, la proclamation du premier Empire galactique en remplacement de la République millénaire, le combat entre Yoda et Darth Sidious, et bien sûr celui entre Obi Wan et Anakin sur la planète volcanique. Mais les moments les plus émouvants sont sans doute ceux qui voient, habilement mis en parallèle, la mise au point de l’armure noire de Vador et l’accouchement de Padmé... La transition, de ce point de vue, est réussie, et même si on pourra toujours trouver quelques incohérences subsistantes, n’oublions pas que 20 ans séparent l’épisode III du IV, sans que l’on sache avec précision tout ce qui s’est passé durant cette période.
Pour unifier encore davantage son cycle de six films, Georges Lucas a développé les clins d’oeil et les références, qui au Faucon millénium, qui à Chewbacca (même si sa présence est surtout là pour faire plaisir aux fans, ne servant quasiment pas à l’évolution de l’intrigue), qui à certaines répliques récurrentes (« I have a bad feeling about this »)... Sans parler de la musique de John Williams, bien sûr, toujours impérial ! Mais le film dont se rapproche le plus La revanche des Sith est à cet égard Le retour du jedi, au delà même du titre. En effet, le combat entre Anakin et Dooku rappelle fortement celui de Luke contre Vador devant l’empereur, la finalité étant identique, la succession d’un apprenti âgé par un autre plus jeune. De même, la conclusion de l’affrontement entre Mace Windu et Palpatine évoque le triptyque Palpatine-Vador-Luke, avec l’enjeu de savoir qui sauver et qui tuer... Enfin, la bataille sur la planète des wookies ne rappelle-t-elle pas celle d’Endor, avec les eewoks ?
Véritable tragédie science-fictive, La revanche des Sith nous entraîne dans un univers sonore et visuel toujours d’une grande richesse, empli de références (les films de pirates avec les deux vaisseaux qui se canonnent au début du métrage, par exemple), sans pour autant éviter certains défauts : un montage des combats au sabre-laser régulièrement trop saccadé et privilégiant les plans rapprochés au lieu de plans larges, des répliques qui manquent parfois d’envergure, surtout dans les passages romantiques, des questions demeurant sans réponses fournies (pourquoi Vador ne se suicide-t-il pas en apprenant le sort de Padmé ?)... A contrario, le substrat politique est particulièrement développé, proposant une vision de la démocratie toujours susceptible de verser dans l’autoritarisme, avec de nettes allusions au contexte sécuritaire des Etats-Unis de Bush junior. L’idéal de Georges Lucas semblant résumé par Obi Wan critiquant l’absolutisme du raisonnement d’Anakin : un juste milieu, une modération ouverte au dialogue et au compromis, et rejetant l’extrémisme. Reste en tous les cas un film qui conclut ( ?) avec succès la saga cinématographique de science-fiction la plus célèbre de notre temps.