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VAN HELSING
Transylverado ou Sommers Time ?
dimanche 9 mai 2004, par ,
Stephen SOMMERS (1962-)
Etats-Unis, 2004
Hugh Jackman, Kate Beckinsale, Richard Roxburgh, David Wenham
Productrice des films d’horreur des années 30 mettant en scène momie, loup-garou, monstre de Frankenstein et autres Dracula, la firme Universal revient donc à ses premières amours avec ce van Helsing, toujours avec Stephen Sommers, le réalisateur de la version moderne de La momie. Adversaire traditionnel de Dracula, van Helsing n’a pas pour habitude de se colleter aux loups-garous. Il est vrai qu’on imaginerait difficilement le frêle et intellectuel Peter Cushing affronter ces monstres au corps-à-corps.
Ça tombe bien parce que Hugh Jackman n’a pas le physique du rat de bibliothèque - fonction remplie par le frère convers un peu Q sur les bords et qui l’accompagne - pas plus que le look car son cache-poussière, son six-coups et son stetson ne dépareilleraient pas un western (Transylverado aurait fait un bon titre, non ?). Chargé par un ordre religieux aussi syncrétique que crétin - parce que réunion de religions dont la différence de philosophie empêche justement leur collusion - d’éliminer ces engeances maudites que sont les créatures non-humaines, l’amnésique van Helsing espère aussi retrouver son identité. Après avoir affronté dans Notre-Dame, un Mr. Hyde tirant sur le Hulk et le Quasimodo (assez proche de celui de La Ligue des gentlemen extraordinaires), il se voit confier la mission de sauver les descendants de la famille Valerious, ennemie séculaire du prince des vampires.
Visuellement, van Helsing est dans la logique de La momie et l’informatique autorise quelques trésors comme le géant Mr Hyde, ou des vampires très soignés sans parler des prouesses que sont les transformations des loups-garous ou même les lycanthropes eux-mêmes. Le tout est emballé dans un décor plus gothique que le néo-gothique et abonde en armes de tout genre, fleurant parfois l’eau bénite, souvent le pieu ou la balle en argent, arsenal d’où émerge une réjouissante arbalète à répétition, pure création steampunk. Les scènes d’hommage à de glorieux ancêtres sont également présentes, du moulin de l’introduction (déjà utilisé par James Whale dans son Frankenstein de 1931 ) au Bal des vampires (sic) de Budapest... En revanche le scénario tend à privilégier les scènes de bagarres et d’action aux dépens d’une histoire, certes alambiquée, mais insuffisamment creusée qui n’est pas sans rappeler le récent Underworld par son érection des loups et vampires en ennemis mortels.
Autre point commun avec le film de Len Wiseman, Kate Beckinsale et son jeu hiératique que sa beauté ne suffit pas à compenser. On se plaît à souhaiter le retour de la souriante potiche de Beaucoup de bruit pour rien (Brannagh, 1993). Hugh Jackman ne brille pas non plus et s’avérait plus à son aise dans la composition de Serval dans X-Men. Si l’on ajoute le cabotinage de Richard Roxburgh bien inférieur à l’aristocrate Dracula de Christopher Lee ou au vampire gothique de Gary Oldman, ou le falot Carl, interprété par David Wenham plus à son aise en Faramir dans Le retour du roi, le spectateur attardé aura compris que de belles images ne suffisent pas à compenser un film somme toute assez neuneu que l’on peut néanmoins trouver divertissant. Enfin, les jours chômés pluvieux se prêtent bien à un cinéma mais faut-il pour autant aller voir n’importe quoi ?
L’avis de Francesco
Il y a un " truc " Sommers. Est-ce un style, est-ce une méthode ? A chacun de se faire son idée. En tout cas, c’est un truc qu’on ne trouve que chez ce réalisateur. Les films de Sommers ne sont pas de " grands " films. Ils ne deviendront pas des classiques. Mais, de La Momie à ce Van Helsing, ils méritent amplement d’être vus. Sans doute parce qu’ils débordent de générosité. C’est sûr, ce gars-là nous en donne pour notre argent.
Préposé à la relecture des films de la Hammer, Stephen Sommers n’a pas dû trop se faire prier pour pondre Van Helsing. Il s’agissait tout de même, pour la première fois depuis longtemps, de réunir des icônes du fantastique telles que Dracula, la créature de Frankenstein et le loup-garou. Mister Hyde viendra même faire quelques cabrioles sur Notre-Dame de Paris. Pour que le scénario tienne à peu près debout (ce qui n’est pas toujours le cas, d’ailleurs), il n’est donc pas question de retrouver l’authenticité des romans originaux. On découvre que Dracula est le mécène du docteur Frankenstein et que c’est un chaud lapin. Lapin est le bon terme puisque ses trois nénettes pondent plus que dans Aliens. Mais les œufs n’éclosent pas. D’où l’utilité de Frankenstein qui, pour ce qui est de donner la vie, est presque aussi bon que Dieu.
Tiens, parlons-en, de sa créature : elle bouffe à tous les râteliers. Elle hérite des vieux films le côté technologique (y a de la lumière sous le crâne et ses articulations semblent bien pneumatiques) et la présence d’Igor, le domestique bossu, mais elle tient aussi du roman original, dont l’enjeu a été souligné récemment par le film de Kenneth Branagh. La créature souffre de sa séparation d’avec son père et veut vivre, malgré ses différences avec les autres, les créatures de Dieu (ou du diable, c’est selon).
Et Van Helsing ? Alors, prenez des notes parce que c’est compliqué et pas mal tiré par les cheveux. Voyez-vous, un type a juré que lui et sa dépendance n’auraient jamais de repos tant que Dracula ne serait pas définitivement mort. C’était à l’époque où on ne jurait pas en vain. Ce qui fait que, quelques siècles plus tard, il ne reste qu’un frère et une sœur (Kate Beckinsale, qui jouait un vampire casseur de loups-garous dans Underworld, le monde est petit), qui n’en ont plus pour longtemps, à force de s’attaquer au vampire. Donc (oui " donc ", et ne vous avisez plus de me couper) le Vatican, qui n’est pas ce que nous croyons, envoie son meilleur agent pour éviter que toute la famille ne débarque sans armes ni bagages directement en enfer. Evidemment, cet homme, Van Helsing, n’a pas grand-chose à voir avec le docteur Abraham Van Helsing du roman de Stocker. Celui-là, rebaptisé Gabriel, ce qui n’est peut-être pas un hasard, a tout oublié de son passé et se comporte tel un mercenaire. Bourré de gadgets comme James Bond, il se fait engueuler comme l’espion de Sa Majesté pour sa tendance à tout casser. Mais dans ce genre de film, le héros doit tout casser, sinon le spectateur a une impression de vide.
Là-dessus se greffent de faux mystères historico-familiaux (bof), avec un peu de loups-garous pour faire le liant. Malgré ce bordel scénaristique sans nom (enfin si, ça s’appelle Van Helsing, mais je vous ai déjà dit de ne pas m’interrompre, grr), Stephen Sommers donne l’impression de maîtriser ses images et ses tonnes d’effets spéciaux. Une scène en donne la preuve : pendant que Van Helsing, transformé en loup-garou, se bat contre Dracula, et que la fille se mesure à l’une des femmes de Dracula, le petit moine tente de passer de la deuxième au premier et d’un bout du château à l’autre en dépit des attaques d’Igor. Simultanément, la créature de Frankenstein, libérée par Van Helsing, fait le chemin inverse, sauve le moine, se fait sauver par lui et finit par sauver la fille. Le tout dans un ensemble virevoltant, façon Sam Raimi dans Spider-Man. Mais il y a tout de même de l’abus dans cette maîtrise : pourquoi, au début, Stephen Sommers s’embête-t-il à faire du noir et blanc pour figurer une scène qui ne s’est passée qu’un an avant le récit ? Pourquoi, également, faire saliver sur une origine commune de Dracula et de Van Helsing et en dire finalement si peu ? Pourquoi avoir négligé d’harmoniser un tant soit peu le jeu des acteurs : Hugh Jackman joue son personnage comme il interprétait Serval et le type qui s’est mis dans la peau de Dracula a fait de ce sombre et effrayant séducteur un agaçant mégalomane qui ne peut s’empêcher de parler dans les aigus. Sans compter les gars des effets spéciaux qui lui changent son dentier vampirique à chaque fois qu’il ouvre la bouche. C’est comme ça, il y a des cymbales, plein de jolies images et des vaches qui volent mais personne pour dire à Sommers qu’il fait n’importe quoi.