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La Lune seule le sait

vendredi 1er décembre 2000, par Maestro

Johan HELIOT (1970-)

France

Mnémos, coll. Icares, 2000

Confessions d’un automate mangeur d’opium avait déçu, proportionnellement aux espoirs qui étaient placés en lui et qui le voyaient déjà comme une pierre fondatrice. Avec ce roman, le premier de Johan Heliot, le steampunk " à la française " a certainement trouvé un de ses maîtres, et la SF française un de ses nouveaux espoirs. On peut rapprocher le talent de cet auteur trentenaire de celui de Michael Rheyss, auteur de la nouvelle " L’Apopis Républicain ", basée elle-aussi sur une uchronie bonapartiste. Premier constat : l’homme a un réel sens de l’écriture, et la première phrase du roman en témoigne d’emblée. D’autre part, si ses personnages peuvent apparaître quelque peu archétypaux (Napoléon III, et son rire sardonique, en particulier, flirtent avec la caricature), certains de leurs traits de caractère les montrent progressivement sous un jour plus nuancé, plus réaliste (le préfet de police Andrieux, surtout, ou le journaliste Giboulet, a priori suppôt du régime en place).

Tous les éléments d’un bon roman steampunk sont en tout cas réunis : des personnalités célèbres, placées dans des situations alternatives (Jules Verne en héros, Victor Hugo en chef d’orchestre de l’opposition à Napoléon III, Henri Barbusse placé dans une situation qui remplacera pour lui le traumatisme de la première guerre mondiale) ; une société du XIXème siècle dans laquelle le progrès technique s’est accéléré (ici grâce à l’apport des acquis d’une espèce extra-terrestre) ; une ambiance dominée par les circonvolutions artistiques du métal, inspirées de Gustave Eiffel ; bref, une délicieuse impression de " fin de siècle " et de rétro...

On retrouve également, tout comme chez Ayerdhal ou Serge Lehman, un substrat politique relativement développé, et un éloge des velléités révolutionnaires et utopiques. L’opposition au second empire semble en effet pratiquement unie autour des idées marxistes, et le socialisme apparaît comme leur objectif commun ; un socialisme qui se révèle d’ailleurs contradictoire avec celui, criminogène, d’un Stéphane Courtois. Le personnage de Louise Michel, dévouée corps et âme à ses idéaux, en est la meilleure illustration. Plus, elle souhaite une alliance des progressistes avec les Ishkiss, incarnation d’une société égalitaire, ce qui n’est pas sans évoquer l’idée de dissidents " posadistes " (issus d’une scission du mouvement trotskyste) qui prônaient une alliance entre le prolétariat terrestre et les extra-terrestres contre la bourgeoisie mondiale...

C’est également une manière d’hommage, que d’amener Jules Verne sur la Lune, et d’y faire se dérouler une révolte (ou révolution) à caractère socialiste, qui évoque le fort bien nommé roman d’Heinlein Révolte sur la Lune. La postface de l’auteur est d’ailleurs bienvenue, et nous en apprend un peu plus sur l’élaboration du livre ainsi que sur les convictions bien affirmées de l’auteur, ce qui est plus qu’appréciable ! La SF française est décidement en pleine forme ! Pour contacter l’auteur : johan.heliot@wanadoo.fr

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