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La véritable histoire du dernier roi socialiste
samedi 8 mai 2004, par
Auteur : Roy LEWIS (1913-1996)
Pays : Grande-Bretagne, 1990
Editeur : Actes Sud, 1993, 288 p.
L’uchronie est un genre de récits qui semble tenter aussi bien les auteurs de SF que ceux de la littérature " blanche ". Ainsi, Roy Lewis nous propose ici une divergence majeure, centrée principalement sur le Printemps des Peuples de 1848 ; mais un Printemps des peuples qui aurait réussi, grâce à l’insurrection des chartistes anglais contre les classes dirigeantes du royaume, et à l’aide qu’ils fournirent aux révoltés du continent. L’Europe toute entière (ainsi que les Etats-Unis) est donc devenue socialiste. C’est un socialisme qui n’est pourtant nullement marxiste, puisqu’il a volontairement limité l’essor industriel afin de ne pas bouleverser la structure de la société. Les scientifiques continuent pourtant de réaliser découvertes et inventions, mais elles font à chaque fois l’objet d’analyses pointues, visant à déterminer si leurs effets positifs l’emporteront sur les négatifs, ce qui explique la très faible progression de la technologie.
Le roman se centre sur la vie de George, roi d’Angleterre et empereur des Indes, puisque la monarchie britannique est devenue une double monarchie, anglo-mogole, afin de souder les deux pays l’un à l’autre. En cette première moitié de XXème siècle, ce souverain constitutionnel, marginalisé sur le plan de la direction des affaires, va nourrir de plus en plus de doutes quand au caractère bénéfique du système conservateur dans lequel il vit, à la fois par curiosité intellectuelle, amour pour une contre-révolutionnaire capitaliste, puis révolte contre la mort d’un fils qui aurait pu être évitée avec des médicaments existant mais non diffusés... L’histoire se lit agréablement, avec des touches d’humour pince-sans-rire appréciables, mais on regrettera le côté un tantinet superficiel de l’ensemble, certaines réflexions n’étant pas poursuivies très loin. La vision du socialisme présentée par l’auteur semble ainsi trop sommaire, tout comme la contre-révolution capitaliste, abordée comme étant la clef de l’abondance et du bonheur.
Fort heureusement, la fin du roman, avec les risques de déflagration mondiale qui se font jour, tend à atténuer ce qui pourrait presque passer pour un éloge du capitalisme, n’était-ce l’ironie sous-jacente que l’on devine. Un surcroît de contenu aurait certainement pu faire de ce livre un classique de l’uchronie ; il n’en restera qu’un divertissant essai.