L’amour au temps des dinosaures

John KESSEL (1950-)

Etats-Unis, 1997, Corrupting Dr Nice

Denoël, coll. Lunes d’encre, 2002

Habituellement le voyageur temporel est un personnage discret, soucieux de ne pas se faire remarquer par peur d’écraser un papillon provoquant ainsi la destruction de l’humanité ou de tuer son ancêtre et lui par la même occasion (Le voyageur imprudent de René Barjavel). Selon des règles variables chez les auteurs, il ne peut généralement pas ramener d’objet et encore moins d’être vivant, Sans parler du chien !

Alors lorsque Owen Vannice ramène du crétacé à des fins scientifique une jeune apatosaure prénommée Wilma, le lecteur inquiet pourrait s’attendre à la fin du monde connu et au basculement dans une autre dimension. Tel est bien le cas puisque le Jérusalem de l’an 40 de l’ère chrétienne où arrivent nos deux voyageurs est colonisé par les futuriens et fait office d’un luxueux club Méditerranée à partir duquel les touristes s’immiscent parmi les Historiques à d’autres époques proches afin d’assister à la crucifixion ou à l’assassinat de Jules César lors des ides de mars de 44 avant J.C. Coincé au Ier siècle, Owen rencontre la séduisante Geneviève Faison alias Jean Harrington alias Eve Sedgwick alias Gabrielle Tourtereau, escroc temporelle dont la principale activé consiste à arnaquer sous la direction de son paternel les voyageurs nantis dans son genre. De cette rencontre fortuite dans une époque tumultueuse alors que se prépare une révolution zélote, naît un amour tout aussi tumultueux dont les transports n’ont pas fini de bouleverser l’an 2063.

Sur fond d’un hommage à la comédie américaine du milieu du XXe siècle dont la trame de l’histoire reprend les arcanes et les titres des chapîtres détournent ceux des films de Capra, Cukor, Hawks, Lubitsch et autre Billy Wilder, John Kessel offre un livre humoristique mais bien différent de celui de Connie Willis ou de ceux de Fredric Brown, tout en menant une réflexion sur les droits à l’exploitation systématique non sans peser le pour et le contre, comme l’illustre les plaidoieries de Lincoln et du Christ. A coup sûr, L’amour au temps des dinosaures sait distraire ses lecteurs mais il est loin de réaliser un chef d’oeuvre, un livre sympathique tout au plus.