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Les mosaïques du temps

jeudi 6 septembre 2001, par Maestro

Gérard KLEIN (1937-), Ellen HERZFELD et Dominique MARTEL

France, 1950-1980

LGF, coll. Livre de Poche, 1990

Les mosaïques du temps constituent la conclusion du versant français de La grande anthologie de la science-fiction du Livre de Poche. Pour compléter les trois volumes précédemment parus (dont Les mondes francs), qui couvraient la période 1950-1984, diverses nouvelles qui n’avaient pas pu être retenues, ont été réunies. Contrairement à ce que l’on pourrait penser de prime abord, il ne s’agit pas là de chutes sans grand intérêt, mais de textes de qualité, parfois même brillants, avec une domination écrasante de la période ouverte avec mai 68, et au travers desquels on retrouve bien des signes particuliers de la SF française.

Le goût de l’écriture littéraire, de la belle phrase, est ainsi représenté, avec " Le savant plaisir ", de Georges Panchard, déchéance d’un ancien champion sportif (sa spécialité particulièrement absurde étant le saut sans parachute), " L’homme englué " de Jean-Jacques Girardot, ou " Froide est ta peau, Sytia. Morne mon désir ", de Dominique Douay. On atteint même à une sorte de poésie presque surréaliste dans son propos, avec " Navigation en tour close ", de Jean-Pierre Hubert. Les problèmes de l’opposition réalité/illusion et du psychisme afférent constituent également un thème important, que ce soit dans " L’hippocampe " de Lorris Murail, tragédie d’un homme qui voit progressivement sa mémoire à long terme se dissoudre dans l’oubli, ou dans le beau " Froide est ta peau, Sytia. Morne mon désir " et son illusion d’une beauté éternelle.

Le texte de Bernard Mathon, " Onze malheureux phonèmes ", va encore plus loin, avec sa thèse d’une réalité qui est fonction du langage que nous utilisons, et qui conditionne nos pensées, voire nos perceptions. On trouve également dans ce recueil des textes plus subversif, propre à une certaine tradition française de politisation. Ainsi, " L’homme englué " et son savant soumis lui-même par l’armée -pour laquelle il travaille- à un traitement pour accélerer ses performances intellectuelles, ou " Réhabilitation ", de Gérard Klein, terrible démonstration des horreurs absurdes de la guerre, sont des condamnations antimilitaristes. On peut également y rattacher " Bruit de fond " de Philippe Curval, à la conclusion particulièrement cynique, ou même le plus difficilement classable " Mission fractale " de Michel Jeury.

La religion n’est pas épargnée non plus, avec " Le triptyque de Kohr ", de Christian Léourier, critique féroce des religions instituées et de leur immobilisme réactionnaire, ou " Est-ce moi qui blasphème ton nom, Seigneur ? ", de Daniel Walther, illustration particulièrement efficace de l’aliénation générée par les croyances religieuses. Dans un autre style, le savoureux " Comment vont les affaires ? " de Jacques Sternberg tourne en dérision la recherche du profit maximum par le système capitaliste, tandis que Jean-Pierre Andrevon, avec " Le Mond enfin ", fait l’éloge d’un monde laissé de nouveau à la nature, sans le parasite humain, un texte essentiellement basé sur de savantes descriptions zoologiques, et qui se situe bien dans l’atmosphère de ces années militantes post-68, imprégnées d’écologie.

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