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LA REVANCHE DES HUMANOÏDES

dimanche 17 septembre 2023, par Maestro

Albert BARILLÉ (1920-2009)

France, 1983

Avec les voix de Roger Carel, Annie Balestra, Claude Chantal, Vincent Ropion, Alain Dorval, Yves-Marie Maurin.

Quarante ans après sa première sortie au cinéma, La Revanche des Humanoïdes a bénéficié d’une restauration en bonne et due forme pour une nouvelle sortie sur grand écran. La Revanche des Humanoïdes, c’est un long métrage un peu hybride, puisqu’il a été conçu à partir des six derniers épisodes de la série Il était une fois… l’espace. On touche là, pour ceux qui sont nés dans les années 1970, à un souvenir souvent marquant : pensez donc, une série animée française de science-fiction, diffusée à la télévision chaque jour cinq minutes avant 20h, l’épisode complet étant lui diffusé en intégralité le samedi. Une chose est sûre, me concernant, le souvenir de cette série est profondément enfoui, tant son générique véhicule d’émotions et de nostalgie (et explique aussi le choix de mon pseudonyme sur Wagoo, tout de même !). Au point de pouvoir encore aujourd’hui, à la vision du film, anticiper sur certaines répliques !

Bien sûr, revoir un film d’animation de cette époque, c’est être plus sensible à ses défauts, disons plutôt ses limites : les mouvements simultanés à l’écran sont réduits, la superposition des animations parfois trop visible, certains détails peu travaillés particulièrement sur les plans larges… Mais il ne faut évidemment pas oublier qu’il s’agit d’une production 100% française, sans aide en provenance de l’extrême orient. Les bruitages, d’ailleurs, se ressentent de l’influence de l’animation japonaise importée en France – on pense à Goldorak, en particulier. Mais le gros atout de Il était une fois… l’espace et partant de La Revanche des Humanoïdes, c’est sa musique. Œuvre de Michel Legrand, il s’agit d’une partition aux thèmes forts, digne des plus grands. Le générique a toutefois été légèrement modifié pour le long-métrage, puisque c’est une chanteuse étatsunienne, Virginia Vee, ancienne membre des Peters Sisters, qui l’interprète, en français mais avec un délicieux accent : un moyen peut-être de viser l’internationalisation du métrage ? Autre point fort, le travail de Manchu, bien connu des amateurs de science-fiction pour ses couvertures de livres : paysages futuristes, vaisseaux spatiaux sont généralement d’une grande beauté.

Sur le plan du scénario, le film souffre principalement de l’utilisation d’ellipses, du fait de l’absence de la profondeur permise par la série, forte de 26 épisodes au total. Ainsi, on ne comprend guère la première apparition de l’être de lumière à Psi, cette dernière l’ayant déjà rencontré par le passé… L’intrigue est centrée sur ce qui constitue l’ultime arc narratif de la série, la confrontation avec le Grand Ordinateur. Albert Barillé s’inscrit ce faisant dans un courant déjà ancien de la science-fiction, celui de la crainte à l’égard de machines susceptibles de dépasser leur créateur humain. Et comme dans les années 1960 ou 1970, l’évocation du Grand Ordinateur passe par le gigantisme : immense conurbation, vaisseaux s’assemblant pour former un destructeur de planètes (on pense bien sûr à l’influence du premier Star Wars), ville capable de se muer en monde autonome dans l’espace (on pense cette fois aux Villes nomades de James Blish), niveaux sans fin des fichiers du Grand Ordinateur (une vision forcément influencé par le monde des Krells dans Planète interdite)… Pierrot et Psi ont justement découvert fortuitement l’existence de cette puissance sans égale, et leur mission est interrompue par la chute de leur astronef sur une planète contrôlée par les machines. Tandis que Psi est capturée et emmenée au quartier général du Grand Ordinateur, Pierrot, sauvé par les humains du lieu, va tout faire pour la libérer. C’est l’occasion de diverses péripéties, centrées sur la traversée d’une nature essentiellement hostile et sur l’alliance nouée avec des marginaux mi pirates mi rebelles. La libération de Psi coïncide alors avec la rencontre entre le Grand Ordinateur et les émissaires d’Oméga, qui ouvre sur une progression dramatique bien maîtrisée.

Ce qui sépare dans le film l’humanité ou le biologique du mécanique ou de l’analogique, c’est la capacité à éprouver des émotions. Critique du bellicisme et de l’impérialisme, place importante des femmes (la Confédération galactique d’Oméga est dirigée par une présidente, le personnage de Psi est non seulement télépathe – ce qui nous vaut un duel à la Merlin l’enchanteur – mais également non blanche), éloge de l’entente entre espèces diverses comme le faisait déjà Star Trek, jusqu’à une vision cosmique d’une intelligence destinée à toujours progresser vers davantage de fraternité, de tolérance et de conscience du tout que forme la vie sous toutes ses formes (on pense cette fois à Olaf Stapledon, surtout que le voyage sidéral de Maestro et la manipulation de la nature d’une étoile par les intelligences avancées sont autant de similitudes avec Créateur d’étoiles), les qualités de La Revanche des humanoïdes sont nombreuses, et rendent ce long-métrage un peu artificiel sincère et touchant, quand bien même son contemporain Les Maîtres du temps, avec qui il partage en grande partie son dénouement, peut apparaître un cran au-dessus pour ce qui est de la réalisation et de la complexité du scénario…

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