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Le Travail du Furet

dimanche 5 juin 2016, par Maestro

Jean-Pierre ANDREVON (

France, 1983

Le Travail du Furet (à l’intérieur du poulailler, comme le comprenait le titre original) est un roman typique du style Andrevon, mais transposé dans une ambiance de roman noir. On retrouve en effet cette prose qui colle au réel, celui de la transpiration, du sang, du stupre, incarné ici par un assassin professionnel, un Furet, qui a comme seules passions le vieux cinéma (Hitchcock et Lang en tête) et sa chaste relation avec Jos, la prostituée. Nous sommes au milieu du XXIe siècle, dans une société glauque qui n’est pas définie avec précision, mais ressemble fort à un des derniers échos de la peur démographique si présente dans les deux décennies antérieures. Nous naviguons en effet dans une seule et unique mégalopole, à travers des quartiers dont les plus pauvres semblent surpeuplés. Surtout, l’Etat réglemente de manière drastique la population, en tirant au sort plusieurs centaines de milliers de personnes par an destinées à être effacées. Le protagoniste central du roman commence toutefois à voir sa vie sortir de ses rails lorsqu’il commence à s’interroger sur les liens possibles entre ce tirage au sort des condamnés et les cabines de vérification de la santé, obligatoires pour tous les individus.

Le Travail du Furet, par certains aspects, s’apparente à une projection de la société néo-libérale alors en plein essor au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Au-delà du titre, qui fait référence à la critique de Marx, on découvre un monde où les inégalités sont plus énormes que jamais, avec des pauvres plus pauvres et des riches plus riches. Un monde individualiste, où chacun meurt sans que ses voisins s’en émeuvent outre mesure ; cette mort pouvant tomber comme un couperet à tout moment ressemble d’ailleurs à la fameuse « main invisible » du marché. Une société dans laquelle les marques sont devenues omniprésentes, tout comme la publicité, et où chacun est fiché électroniquement via une puce sous-cutanée, le POU (sic). Une société, enfin, où les statistiques règnent en maîtresses, une vision comptable du réel qui n’hésite pas à manipuler le hasard pour que l’idéal et l’immanent coïncident exactement. On retrouve ainsi bien des éléments de la critique sociale et anarchiste d’Andrevon, à commencer par cette vision cynique et négative de l’Etat.

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