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Métro 2033

dimanche 3 septembre 2017, par Maestro

Dmitry GLUKHOVSKY (1979-)

Russie, 2007, Метро 2033

L’Atalante, collection Le Livre de poche, 2017, 864 pages.

Métro 2033 est un roman phénomène : best-seller international, il a lancé la carrière de son géniteur, et engendré suites et histoires parallèles écrites par d’autres auteurs (pas moins d’une quarantaine de titres, dont deux seulement ont été traduits en français à ce jour), sans oublier une série de jeux vidéo. Pourtant, comme Silo, de prime abord, rien de foncièrement original sous le soleil : la Terre a subi une catastrophe majeure, et le résultat de ce suicide atomique est l’annihilation presque totale de l’humanité. A Moscou, les survivants ont trouvé refuge dans les couloirs du métro.

Et c’est là que le talent de Dmitry Glukhovsky se manifeste. En campant Artyom, un jeune homme résident d’une station frontalière, barrage contre l’invasion des Noirs (sortes de mutants venus de la surface), qui s’engage auprès d’un ami de son père adoptif à remplir une mission – se rendre à Polis, la mythique cité centrale, temple du savoir –, il nous permet d’arpenter les voies et les stations de cet abri de la dernière chance. Outre l’exotisme affirmé, pour un lecteur français confronté à un métro étranger et peu connu du grand public, Métro 2033 suscite immédiatement l’intérêt par l’atmosphère glauque qui y règne, les mythes qui y pullulent, les galeries de personnages singuliers qui y rodent, et la variété de stations et de modes de vie. Dmitry Glukhovsky se situe ainsi dans la digne lignée de l’excellente nouvelle de Serge Brussolo, « Subway, éléments pour une mythologie du métro » (republiée dans le récent Trajets et itinéraires de la mémoire). Il y a un véritable foisonnement légendaire, autour du sort réservé aux morts, de la nature des tunnels du métro, de leur proximité ou non avec l’enfer, des réseaux parallèles qui existeraient et scruteraient les voyageurs lambda (héritage soviétique ?), etc…

De soleil, il n’est pas question ici, tant la survie s’effectue à l’ombre de mille dangers, et d’une peur latente, celle du noir, des ténèbres dominant dans les tunnels, des forces obscures et des créatures voraces. Et dans ce registre, Dmitry Glukhovsky parvient à instiller à ses lecteurs un incontestable malaise. Nombre de stations sont de véritables microcosmes, ainsi que l’illustre le magnifique plan du métro proposé sur les rabats de la couverture de l’édition poche : on trouve ainsi dans ces profondeurs la ligne Rouge, ensemble de stations témoignant de la nostalgie soviétique, et qui se fixe comme but la construction du socialisme sur une seule ligne (sic), des stations contrôlées par diverses mafias, une confédération régie par le commerce et l’économie capitaliste, ou d’autres touchées par des épidémies. Un monde paradoxalement d’une grande richesse, bâti dans les fondations du nôtre et où la récupération et la débrouille sont reines. Les seuls à oser s’aventurer à la surface, les stalkers (hommage au roman des frères Strougatski), dans l’espoir de récupérer des artéfacts du monde d’avant, le font au péril de leur vie. Dans ce roman qui se suffisait initialement à lui-même, Artyom, par ce qui s’apparente à une véritable odyssée, nous permet de découvrir la plupart des facettes de ce métro, cadre idéal d’un jeu de rôles.

Voilà qui pourrait rappeler au lecteur français la diversité d’un autre univers post apocalyptique, celui de la Compagnie des glaces. Toutes ces tendances, néo-stalinienne, religieuse, tendance sectaire majoritaire ou sataniste mystique, Dmitry Glukhovsky les traite avec une distance moqueuse, dans un esprit typiquement post-moderne, à l’exception de la Hanse, marque peut-être de l’acceptation de la réalité capitaliste. Ainsi que le dit Melnik, le stalker, rien ne change jamais, ne laissant que la simple survie comme unique motivation valable.

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