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Les brigades fantômes
dimanche 17 septembre 2023, par
John SCALZI (1969-)
États-Unis, 2006, The Ghost Brigades
L’Atalante, coll. « La dentelle du cygne », 2007, 416 p.
Pas facile de revenir à une série qu’on a lâchée il y a des lustres après la lecture du seul premier tome. Pourtant Le vieil homme et la guerre m’a laissé un agréable souvenir, quoique pas forcément comme ayant un contenu impérialiste comme j’ai pu l’écrire. Si la curiosité m’a fait ouvrir sa suite, Les brigades fantômes, l’appréhension de devoir me remettre dans le bain d’un univers et celle de ne pas me souvenir de l’histoire du premier tome m’ont empêché de rentrer facilement dans l’histoire. Pourtant, outre que John Scalzi a réussi la prouesse de distiller des rappels sans alourdir son récit, il a aussi fait des Brigades fantômes une histoire clairement distincte du Vieil homme et la mer quoique non dénuée de lien.
Ainsi, si l’intrigue des Brigades fantômes se situe chronologiquement après celle du Vieil homme et partage avec lui des personnages communs (notamment le lieutenant Jane Sagan), elle est en revanche centrée sur un autre personnage qui appartient aux forces spéciales des Forces de Défense Coloniales (FDC). Quand John Perry, le héros du Vieil homme était un Terrien qui a l’âge de 75 ans avait choisi d’incorporer les FDC et pour ce faire avait vu sa personnalité être transférée dans un corps plus jeune et plus performant, Jared Dirac, le héros des Brigades, est comme ses coéquipiers une création ex nihilo, spécialement conçue et formée pour protéger l’humanité et ses colonies spatiales, d’où le terme de fantôme du titre. A cette fin, les forces spéciales sont équipées d’un amicerveau, une prothèse cérébrale qui lui permet d’interagir avec son environnement (arme, vaisseau), mais aussi de communiquer instantanément avec l’ensemble de des membres de sa section.
Jared Dirac a cependant pour particularité d’avoir été utilisé au départ pour héberger la conscience d’un éminent scientifique, Charles Boutin, qui a voulu faire croire à sa mort en utilisant un clone pour dissimuler sa trahison au service des Obins, une espèce extra-terrestre particulièrement pugnace et rationnelle, l’idée étant qu’implanter la personnalité de Boutin grâce à la cartographie cérébrale et l’ADN dans le soldat Dirac conçu spécialement pourrait permettre de connaître et comprendre les agissements passés du traître Boutin et lui remettre la main dessus. Seulement l’opération échoue et au réveil Dirac ne révèle aucune trace de la conscience implantée. Il est donc envoyé rejoindre une unité des forces spéciales tout en étant gardé sous la surveillance de son lieutenant, Jane Sagan.
Récit complétement différent donc. Pas tant dans les scènes qui restent pour beaucoup des scènes d’action militaires, mais surtout dans l’esprit général du roman qui en fait pose la question de ce qu’est la conscience, l’identité et le le libre arbitre, des interrogations très fréquentes dans la créativité humaine. Il est intéressant de remarquer que l’auteur n’évite pas le paradoxe puisque d’un côté le fait d’imaginer le transfert des consciences d’un corps à l’autre suppose que celles-ci ne sont pas que le résultat de la combinaison des neurones, en dépit d’un soit-disant problème de compatibilité entre la conscience de Boutin et le cerveau qui doit la recevoir, problème dont je ne me rappelle pas qu’il ait été soulevé au moment du transfert de la personnalité de John Perry dans Le Vieil homme. De l’autre côté, John Scalzi, pour les besoins de son histoire, imagine la possibilité de créer une conscience, comme si cela relevait donc bien de la pure génétique.
Il ne faut pas pousser trop loin la recherche de la petite bête comme dans beaucoup de roman de SF, mais prendre le plaisir de lecture d’une histoire captivante quand il vient. Une fois rentré dans le livre, j’ai eu du mal à m’en détacher et il a rapidement été englouti, suffisamment vite et avec suffisamment de plaisir en tout cas pour que je ne pense pas attendre trois autres lustres pour lire la suite de la série. Il ne faut cependant jurer de rien et la liste des livres à lire est longue...