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QUARTIER LOINTAIN
C’est l’effet papillon
samedi 11 décembre 2010, par
Sam GARBARSKI (1948-)
Europe, 2010
Pascal Greggory, Léo Legrand, Jonathan Zaccaï, Alexandra Maria Lara, Laura Martin, Laura Moisson
Il faut être un dessinateur vraiment très fatigué pour confondre un TER avec le TGV de Paris au retour d’un festival de bande dessinée. Coïncidence cocasse ou geste inconscient, le dessinateur en question, Thomas Verniaz, échoue à Nantua, Ain, la ville de son enfance et en profite pour se rendre sur la tombe de sa mère. Un papillon, un malaise et l’homme de 57 ans, marié, père de deux filles, revient à lui dans sa peau d’adolescent de quatorze ans, en juin 1967, quelques jours avant que son père ne quitte sa famille pour ne plus jamais donner de nouvelles. Alors si l’homme de 57 ans redécouvre non sans plaisir son adolescence, son amour de jeunesse à distance, avec l’espoir de se réveiller de retour dans sa vie d’adulte, il essaie aussi d’empêcher le départ d’un père qui a bouleversé sa vie et accélérer le décès de sa mère. Ce faisant il découvre des secrets de famille.
Adaptant le manga Quartier lointain de Jirô Taniguchi, lequel fait un caméo pas très hitchcockien, Sam Garbarski réussit parfaitement la reconstitution d’une petite ville de province des années 60 avec une émotion non dissimulée et un soin des détails - la sortie de Belle de jour de Buñuel - qui sentirait le vécu jusque dans les bêtises de l’adolescent. Bêtise dont on s’inquiète parfois de la nature. Il n’en reste pas moins très fidèle à l’oeuvre originale.
Peu de choix ont donc été à faire, et c’est celui du rapport à l’école qui tranche le plus : vécu dans le manga comme un moment où le héros prend conscience de la valeur de l’éducation, il est dans le film de Garbarski un passage pénitentiel où sont imposées quelques tortures comme la version latine ou les vexations du corps professoral.
Côté interprétation, si Léo Legrand, avec son air de jeune Dutronc, s’en sort bien, Pascal Greggory, terriblement vieilli d’ailleurs, fait décidément un homme bien fatigué pour ne pas dire dépressif. Sa joie de retrouver sa famille à la fin est évacuée au profit d’un plan sur la nouvelle BD, une oeuvre qui exorcise les démons de son auteur. En ce sens le film est beaucoup plus nombriliste que le manga. C’est bien là le seul point noir.