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MALEVIL
samedi 23 novembre 2013, par
Denis MALLEVAL (1958-)
France, 2010
Bernard Yerlès, Anémone, Slony Sow, Emilie de Preissac, Pierre Val, Jean-Pierre Martins & Jean-François Garreaud
Faire adapter Malevil par Malleval, fallait y penser ! J’étais curieux de voir ce que Jean Rouaud, prix Goncourt, allait apporter au roman de Robert Merle. Curieux et inquiet, parce que Malevil n’est plus trop d’actualité - la guerre nucléaire inquiète moins que le terrorisme - et que certains choix faits par les survivants dans le livre, la liberté sexuelle induite par le manque de femme notamment, ne sont guère montrables à l’écran ou se verraient vilipender par le communautarisme. A moins que n’en soit fait une critique politique difficilement imaginable sur une chaîne du service public.
Le début est très fidèle au roman, du moins au souvenir que j’en garde, sauf qu’Emmanuel Comte, éleveur de chevaux sur le point de conclure une grosse affaire, dit au revoir à sa compagne qui part rejoindre son père mourant. L’holocauste survient alors qu’il mange dans les sous-sols du château, fuyant une journée particulièrement chaude. Avec lui se trouvaient Thomas, Mme Menou (Anémone), Colin et Greg, resté manger. Eux et les animaux doivent leur survie à l’épaisseur des murs. Après, l’organisation est très rapide grâce au matériel laissé par le grand-oncle Comte : il y a même une mitrailleuse et un compteur Geiger ! La rencontre de Gregoire puis son agression dans le champ qu’il ensemençait, font comprendre aux gens de Malevil qu’ils ne sont pas les seuls survivants. Parti récupérer un cheval, ils récupèrent aussi la jolie Sara. Femme et animaux attisent la convoitise d’un groupe d’individus mené par un pseudo-colonel qui a main mise sur une communauté de survivants. La confrontation est sanglante.
Jean Rouaud a choisi d’extraire du roman de Merle, ce qui n’y était pas : une histoire d’amour. Le film s’attarde à souhait sur la nostalgie masculine de l’amour perdu, le même d’ailleurs pour Thomas et Emmanuel, puis l’amour naissant. Pour désamorcer tout risque de questionnement quant à l’avenir en cas du manque de femmes, les survivants contrôlés par le colonel en comptent un grand nombre.
A été évacuée aussi, - sans doute jugée inintéressante - la question de l’organisation politique. Les problèmes matériels sont eux limités au minimum. On évoquera même pas les affrontements, ils relèvent davantage de l’inconscience, lorsque Thomas se rue au beau milieu d’une réunion ennemie, que de la ruse militaire. Autant les héros du roman étaient sans doute trop malins, trop heureux dans leurs réussites, pour être réalistes, autant ceux du téléfilm sont de fieffés imbéciles prouvant que ce n’est pas un film d’aventure qu’ils interprètent, mais un drame humain. C’est peut-être plus réaliste, mais c’est beaucoup moins drôle. Du moins le tragique a-t-il été poussé au maximum dans sa logique.
Alors, les acteurs s’en sortent bien - tout au plus Yerlès a-t-il un phrasé vaguement Depardivin -, les effets spéciaux sont bien utilisés [1], et les décors bien choisis (en Aveyron qui avait déjà servi pour l’adaptation de Chalonge, mais j’attends encore le film qui saura reprendre l’esprit du roman.