Accueil > CINECSTASY > S > LA SOUPE AUX CHOUX

LA SOUPE AUX CHOUX

C’est quand même ben foutu les étoiles

1999, par Goldorak, Maestro

Jean GIRAULT (1924-1982)

France, 1981

Louis de Funès (Le Glaude), Jean Carmet (Le Bombé), Jacques Villeret (La Denrée

Ce film, trop souvent considéré comme une série B franchouillarde, recèle plus d’une clef de lecture et de vrais messages ; il convient par conséquent de le réhabiliter. Il est né de la conjonction de deux phénomènes : la vogue des OVNI, tout d’abord (tout le monde se souvient de l’impayable Jean-Claude Bourret, notre Fox Mulder national !), qui donna naissance à toute une littérature sur le sujet, et avait peu de temps auparavant [à vérifier pour la date] engendré le pitoyable Gendarme et les extra-terrestres ; et la poursuite de l’exode rural, qui conduisait à une désertification chronique de certaines régions françaises (la fameuse diagonale du vide, dont fait partie le département de l’Allier, où se déroule le film). Cette dernière préoccupation s’incarne dans le film par la marginalisation des deux vieux paysans incarnés par de Funès et Carmet, laissés pour compte du progrès et figés dans leurs mentalités d’antan. A cet égard, leurs discussions sont un bon révélateur d’une certaine vieille France profonde, rétive au progrès, misogyne, méfiante à l’égard des pouvoirs publics (voir leur réticence envers le maire et son discours économique d’« expansion économique » à tout va, image d’un mépris des individus toujours d’actualité)...

Mais bon gré mal gré, les deux personnages nous inspirent de la sympathie, en grande partie du fait de leur vieillesse et de leur solitude. Car La soupe aux choux est bien une parabole sur le mal de vivre du troisième âge, condamné à mourir dans son coin, objet de la dérision des plus jeunes. Le moment où le projet du maire de construction d’un parc de loisirs se concrétise, isolant les deux vieux dans une réserve d’un nouveau type, en est un cruel révélateur. De plus, la confrontation entre le Glaude, qui a passé 70 ans, et sa Francine ressuscitée à l’âge de 20 ans, en particulier leur séparation, illustrent avec une grande émotion le conflit des générations ; ce thème acquiert une résonance d’autant plus grande lorsque l’on sait qu’il s’agit là d’un des derniers films de Louis de Funès, arrivé lui aussi au crépuscule de sa vie. Heureusement, l’amitié est là pour tenir le coup, celle entre le Glaude et le Bombé, ou même celle du Glaude et de la Denrée. La menace extra-terrestre est bien loin ! De plus, à l’encontre du « politiquement correct » d’aujourd’hui, le film est un éloge des plaisirs matériels et simples de la vie : l’alcool (les deux héros sont décrits, à juste titre, comme « confits dans le vin rouge »), la bouffe (du patrimoine de la culture humaine, c’est même la soupe aux choux qui intéresse le plus les extra-terrestres de la planète Oxo !), et même les pets.

On touche là une des limites du film, à savoir son aspect parfois trop forcé : la pénible séance de pets nocturnes relève directement de la plus mauvaise comédie française, surtout qu’il s’agit là du facteur qui attire l’extra-terrestre (piètre opinion de l’humanité !) ; l’interprétation de Louis de Funès est de temps en temps caricaturale, avec ses grimaces si caractéristiques. Toutefois, le jeu des acteurs est généralement de bon niveau, servi par des dialogues efficaces ; signalons en particulier le rôle de composition de Jacques Villeret alias la Denrée, et son langage inoubliable.

Cette critique serait forcément incomplète si l’on n’évoquait pas un élément qui a contribué lui aussi au succès du film, sa musique. Composée par Raymond Lefebvre, un habitué des films de Jean Girault, elle marque les esprits par ses mélodies efficaces, et prouve que la musique à dominante synthétique pouvait produire de la qualité (quel fossé avec ce que certains sortent aujourd’hui des synthétiseurs !!).

Ainsi cette lecture à deux niveau de La soupe aux choux fait que se film reste impérissable. Jadis il berça notre jeunesse (Goldorak ne se lassait pas de le regarder pour décompresser après le massacre d’un Golgoth...), et que nous apprécions pour les grimaces de de Funès, le coté irresponsable de ces deux vieux hors de tous, et pour le denrée avec son regard candide de jeune bizuth de la vie. Maintenant la maturité aidant, c’est la deuxième lecture plus sociale du film qui enrichit et renforce notre opinion vis à vis de se film .

En définitive, un film loin de la superficialité, et qu’on ne se lasse pas de regarder !

Si vous avez aimé comme nous le film allez donc faire un tour sur le Site de La soupe au choux par Frank le soupe master officiel...

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d'indiquer ci-dessous l'identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n'êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions'inscriremot de passe oublié ?