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La grande quincaillerie

dimanche 22 mai 2016, par Maestro

Georges SORIA (1914-1991)

France, 1976

Denoël, coll. "Présence du Futur", 208 p.

Dans un catalogue aussi riche que réputé, et durant près de cinquante ans d’existence, la collection Présence du Futur contient quelques OLNI (objets littéraires non identifiés), parmi lesquels ce roman de Georges Soria, unique incursion de l’auteur dans le domaine de la science-fiction. Ancien militant du PCF, et stalinien bon teint durant la guerre civile espagnole, il a surtout écrit des ouvrages d’histoire des révolutions, et réalisé en collaboration avec Alain Decaux et Robert Hossein des adaptations théâtrales de certains sujets historiques ; entretemps, il s’était fendu de La Grande quincaillerie. Il s’agit d’un livre à la marge, d’une certaine manière, car on y reconnaît certains thèmes empruntés à une culture généraliste de science-fiction, mais sans véritablement s’intégrer aux codes du genre.

L’action se déroule dans un proche avenir, en un pays non identifié dirigé par l’Aéropage, un collectif aussi opaque dans sa composition que dans sa nomination ou son fonctionnement. Dans les grandes métropoles, une vague de violence sans précédent se déchaîne, œuvre principalement d’une population jeune (l’influence d’Orange mécanique semble ici patente). Pour essayer d’y faire face, l’Aéropage confie au GHA, coordonné par l’Arbitre, la mission de mettre au point une procédure permettant aux ordinateurs de surveiller la population afin d’y détecter toute intention d’acte violent, contraire à la norme sociale. Le GHA, ancien Grand Hôtel de l’Abîme, est un centre situé en altitude, qui rassemble la fine fleur des chercheurs en recherche opérationnelle. Mais dans ce monde en partie clos, les tensions vont aller croissant, tous les jeunes membres, déjà humainement opposés, n’étant pas d’accord sur la finalité du projet ; en outre, l’insertion au sein de l’équipe d’un artiste de cirque, expert en transformisme, est un germe supplémentaire de dissension. On pourrait y ajouter les envies théâtrales d’un des chercheurs, qui fait jouer sa première pièce, véritable coup de maître, au sein même du GHA. Sans oublier la surveillance attentive de l’Arbitre et, par derrière, d’une sorte de police politique.

La Grande quincaillerie, et c’est pourtant là solution de facilité de notre part, porte hélas bien son nom. Les préoccupations du milieu des années 1970 s’y reflètent en effet très bien, que ce soit le développement de l’informatique (qui fonctionne ici encore avec des fiches, mais dont les capacités mémorielles approchent d’une miniaturisation accrue), l’opposition des générations, ou la peur d’une société totalitaire. Mais l’ensemble est livré à travers une prose relativement bavarde, faite principalement de dialogues, n’évitant pas un certain jargon, et qui juxtapose des éléments parfois fort disparates (le cirque, le théâtre, ou une forme de logique assez ennuyeuse). Qui plus est, le dénouement confirme une certaine tendance à la superficialité, puisqu’au lieu de questionner la nature des ordinateurs eux-mêmes, Georges Soria s’en prend aux individus, confiant qu’il semble être dans la capacité des plus éclairés (voire du plus grand nombre) à refuser le flicage généralisé et une société du contrôle parfait. Finalement, dans ce roman plutôt médiocre, on retiendra surtout l’idée de déjouer le décryptage des conversations téléphoniques, à l’affut de toute subversion, par l’usage de la poésie, des métaphores et d’un langage fleuri…

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