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JUDGE DREDD
samedi 6 octobre 2012, par
Danny CANNON (1968-)
Etats-Unis, 1995
Sylvester Stallone, Armand Assante, Rob Schneider, Diane Lane, Max von Sydow, Jürgen Prochnow
Difficile de parler de Judge Dredd quand on est français. Le film est une adaptation d’un comics britannique à peine traduit de ce côté-ci de la Manche. Or qui dit comics en France, dit, à tort, super-héros et Judge Dredd en a tous les atouts quand on ne se penche pas trop sur son cas : un costume chatoyant, des armes qui sont aussi des bijoux technologiques, une moto qui vole, digne de James Bond. Mais il y a le truc qui fait grincer des dents la plupart des Français qui se veulent bien-pensant (remarquez ceux-là ne lisent pas non plus de comics de super-héros, cette engeance iconique de l’ arrogant impérialisme américain) : Judge Dredd n’est pas seulement un flic, il est aussi le juge, le jury et le bourreau.
Au XXIIe siècle, l’humanité a failli. Ayant déserté un monde qu’elle a détruit, irradié, asséché, elle a trouvé refuge dans des méga-cités à la criminalité qui serait incontrôlable sans l’existence des juges, des super-flics remplissant en même temps les fonctions précédemment évoquées. Il ne faut pas croire que les juges appliquent systématiquement une sentence capitale, mais il est certain qu’il ne faut pas leur résister par les armes trop longtemps, comme l’illustre la séquence initiale du film qui voit deux juges (dont Diane Lane) venir à bout d’un groupe de fous furieux lourdement armés grâce à l’aide du plus efficace des juges, le juge Dredd (Sylvester Stalone). Pour efficace qu’ils soient, les juges ne suffisent plus à endiguer la criminalité croissante et les juges supérieurs hésitent à élargir leur droit à user de la peine terminale. Le refus du juge suprême Fargo (Max von Sydow) à sauter le pas n’empêchera qu’un temps le durcissement de la justice magistrale : son protégé Dredd ayant été filmé par une caméra de sécurité en train de tuer un journaliste qui remettait en question l’usage de la violence par les juges, le juge Fargo lui épargne la peine capitale en se retirant de sa charge et en partant dans le désert. Mais tout cela n’est un affreux complot visant à renverser le juge suprême.
Impossible de dire si Judge Dredd est fidèle à l’esprit du comics en ce qui concerne la question de la loi, des droits etc... Le film ne porte pas d’ailleurs de réel questionnement là-dessus, et postule que les juges ne font que leur travail dans le respect du cadre juridique qui est celui de la société. Ce qui est certain c’est que le film trahit le comics pour ce qui est des personnalités des juges, totalement effacées derrière leurs fonctions, difficilement méconnaissable sous leurs casques. Or, pour les raisons évidentes du show business, Sylvester Stallone ne porte quasiment jamais son casque. Par ailleurs, le scénario repose en grande partie sur son individualité. Mais là encore, le public qui ne connaît pas Judge Dredd n’a guère de raison d’être gêné.
Il va cependant finir par l’être à force des effets de manche du réalisateur, Danny Cannon, qui confond grandiloquence et héroïsme, contribuant à ridiculiser la réalisation en dépit des moyens mobilisés et des talents réunis comme le prouvent la qualité des effets spéciaux et des décors et la présence d’Alan Silvestri (Retour vers le futur entre autres films) à la musique. L’équipe de production, scénaristes inclus sans doute, a aussi cru bon de faire figurer aux côtés de Sylvester Stallone une espèce de faire-valoir joué par Rob Schneider, destiné à introduire une dose d’humour, un exercice classique des studios américains dont ceux-ci n’ont toujours pas compris ou mesuré le risque et qui, ici, ne contribue pas à l’intérêt du film. En fait, cette même équipe n’a pu se résoudre à faire le choix d’un film sombre, comme la société dans laquelle évolue les juges.
Sans doute, a-t-il été voulu de surfer sur le succès de Demolition Man, un autre film de SF traitant de système judiciaire et de droits qui avait réussi, lui, à concilier humour et action.